Somme 1916 : les préparatifs français

– Force est de constater que les combats menés par les troupes du Général Fayolle sont longtemps restés occultés par ceux de Verdun. Et pourtant, la nature des combats était assez différente car à Verdun, les Français étaient en position défensive, excepté la contre-attaque sanglante sur Douaumont en mai et les tentatives pour dégager le Fort de Vaux. Sur la Somme, les troupes du Groupes d’Armées Nord sont en position offensive. Et si l’on en croit John Keegan, l’armée française a plus soigneusement préparé son offensive que les Britanniques (1). Explications.

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1 – DES OBJECTIFS PLUS LIMITES (ET PLUS REALISTES°

– Ayant vu ses effectifs réduits pour renforcer le Front de Verdun, le Groupes d’Armées Nord commandé par Ferdinand Foch n’a eu le choix que de se concentrer sur des objectifs moins ambitieux que ceux des britanniques. Il faut dire que les généraux français ont abandonné l’idée d’effectuer une percée décisive, contrairement à leurs collègues britanniques Le dispositif français s’étend de l’ouest de Frise (occupée par les Allemands), sur la rive droite de la Somme et la voie ferrée Amiens-Péronne, jusqu’à Continuer à lire … « Somme 1916 : les préparatifs français »

Bataille de la Somme : l’Artillerie britannique

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1 –  BREF HISTORIQUE SUR L’ARTILLERIE  DU BEF (1914-1916)

A l’aube de la bataille de la Somme, l’Artillerie britannique est surprise dans une période de mutation et de perfectionnement, ce qui ne se fait pas sans désordre.

En 1914, chaque batterie d’artillerie comprend 6 canons pour environ 200 hommes (5 officiers, servants, approvisionneurs, cochers, mécaniciens). Les canons plus lourds sont regroupés au sein de batteries plus petites (2-3 pièces). On trouve aussi 2 batteries de canons lourds sur rail. Mais la quantité de personnel servant ne varie pas. Et même, l’évolution de l’utilisation de l’artillerie et « l’alourdissement » des pièces et la diversification du rôle des batteries nécessitent une « spécialisation » des servants de batterie. En outre, les artilleurs sont moins exposés au feu que les fantassins, donc moins vulnérable. Bien que considérés comme « combattants », le taux de mortalité dans leurs rangs est moins élevé que dans l’Infanterie. Encore faut-il distinguer les servants de batteries de campagne placés plus en avant, des artilleurs de pièces lourdes qui peuvent actionner des pièces à plus de 10-20 km en arrière des lignes de tranchées. Si nécessaire, on ponctionne sur les personnels de l’Army Service Corps (logistique) ou de l’Army Ordnance Department (intendance).

– Les Artillery Brigades des corps et divisions étaient (conçues) comme Continuer à lire … « Bataille de la Somme : l’Artillerie britannique »

Bataille de la Somme : l’Infanterie britannique

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1 – PALIER A 
L’INEXPÉRIENCE

– Juste avant le 1er juillet 1916, la IVth Army compte quatre divisions de la Regular Army (4th, 7th, 8th et 29th). Les trois premières ont connu les combats en 1915, tandis que la dernière a connu les épreuves de Gallipoli, notamment au Cap Helles. D’autres issues de la Territorial Army (la réserve) sont arrivées en France également en 1915. Si certaines n’ont pas connu le feu, d’autres ont quand même l’expérience des combats comme la 9th (Scottish) qui s’est distinguée à Loos.

En revanche, la majorité des divisions mobilisées pour la Somme sont issues de la New Kitchener’s Army. Hormis le cas notable de la 36th (Ulster) dont nombre de soldats protestants d’Irlande ont une expérience paramilitaire, le reste n’a jamais vu le front (voir en complément l’article sur les Pals Battalions sur ce même blog). Enfin, en plus d’un manque d’expérience au feu, certaines de ses divisions n’ont pas vu tout leur équipement leur parvenir. Cette lacune est en grande partie due à l’accélération de la production en série d’équipements et d’uniformes, ce qui n’est pas sans causer des pénuries de dotation.

– La doctrine de tactique d’infanterie qu’adopte la IVth Army mêle Continuer à lire … « Bataille de la Somme : l’Infanterie britannique »

La Bataille de la Somme : les objectifs britanniques

– Haig a donc décidé de confier l’offensive sur la Somme à la nouvelle IVth Army du General Sir Henry Rawlinson. Respecté, réputé intelligent et prudent, Rawlinson ne fait pas partie de la coterie des cavaliers (French, Haig, Allenby) qui règne au sein du corps des Généraux de Sa Majesté. Fantassin de formation, Rawlinson a commandé le IVth Corps à Ypres en 1915. Il a pour Chef d’état-major Sir Archibald Montgomery, qui l’accompagne dans cette fonction depuis le début de la guerre. Rawlinson réfléchit également à améliorer l’emploi de l’Infanterie du BEF. Cependant, sa réflexion comporte des lacunes qui auront de graves conséquences, comme nous le verrons.

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Henry Rawlinson

– Haig donne à Rawlinson le secteur allant de la rive droite de la Somme à Fonquevillers, à la jointure de l’aile droite de la IIIrd Army d’Allenby. Le secteur alloué à Rawlinson avait déjà été choisi par Joffre pour son projet d’offensive sur le Somme, le 14 février. Rawlinson installe alors son QG à Querrieu, entre Albert et Amiens. La IVth Army doit compter trois Army Corps mais le 24 mars, le IIIrd Corps de Sir William Pulteney était déjà arrivé dans son secteur au nord de la Somme. Haig demande à Rawlinson d’établir un possible plan pour une offensive combinée alliée en juin ou en juillet.

– Après évaluation, Rawlinson fait rédiger un rapport de projet d’offensive à Haig, le 3 avril. Le commandant de la IVth Army estime que sa zone d’attaque ne devra pas dépasser 19-20 km de large et une profondeur de 2 à 5 km. Il recommande alors d’attaquer entre

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La bataille de la Somme : relancer l’offensive

– Fin 1915, alors qu’Erich von Falkenhayn prépare son offensive contre le saillant de Verdun, les franco-britanniques réfléchissent à l’idée de relancer une grande offensive sur le Front de l’Ouest. L’objectif de Joseph Joffre est d’enfin débloquer l’impasse stratégique dans laquelle les Armées de l’Entente se sont enlisées face à une armée allemande solidement établie en position défensive entre la Mer du Nord et la frontière suisse. En outre, l’expérience sanglante de Gallipoli et la stagnation du front alpin dans le nord de l’Italie conduisent les états-majors français et britanniques à envisager une nouvelle offensive de grande envergure en France, considérée comme le principal champ de bataille, notamment par plusieurs hauts responsables à Londres. C’est ainsi qu’au début de l’année 1916, Joffre et les Anglais conviennent de lancer une nouvelle attaque

– Mais les objectifs de cette offensive – initialement française avec le concours britannique – vont être bouleversés par le déclenchement de l’offensive de Verdun ; outre sa gestation qui n’effectue pas sans désaccords entre les deux alliés.

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De gauche à droite : Joffre, Poincaré, George V, Foch et Haig

– DÉCISION ET COORDINATION FRANCO-BRITANNIQUE

– Si la volonté politique de lancer une offensive « à deux » s’ancre bien dans les têtes françaises et britanniques, il faut définir un objectif et poser (les lignes) de la coordination Londres-Paris ; celle-ci émergeant de ses balbutiements après les offensives de 1915. Durant l’année 1915, Joffre et French avaient coordonné leurs efforts – sans grands succès notables – en lançant conjointement des offensives françaises et britanniques (Crête d’Aubert, Festubert et Loos). Mais comme l’explique W. Philpott, durant cette  même période, on n’observe pas de réelle coordination entre le GQG de Chantilly et l’Imperial Staff (l’État-major impérial). Les conférences interalliées faisaient l’objet de réunions irrégulières. Durant l’opération de Continuer à lire … « La bataille de la Somme : relancer l’offensive »

Les « Pals Battalions » de Kitchener et Haig

– Lors de son entrée en Guerre, l’Armée britannique ne dispose que 120 000 hommes d’active dans ses forces terrestres et 400 000 réservistes environ. Cela tient à deux principaux aspects de l’histoire et de la culture militaires britanniques : d’une part, au regard de l’étendue de son Empire, priorité est donnée à la Royal Navy pour la surveillance des voies maritimes. Deuxièmement, la Grande-Bretagne entretient une petite armée de métier car elle n’a aucune tradition de conscription. Il est arrivé qu’elle intervienne exceptionnellement sur le continent (notamment contre Napoléon en Espagne et à Waterloo) ou outre-mer (Soudan, Inde, Guerre des Boers) en engageant plusieurs dizaines de milliers d’hommes. Encore que la vie militaire n’attire que des jeunes hommes de bonne famille qui peuplent le corps des officiers (à l’exception de membres des classes moyennes ou de la moyenne bourgeoisie qui peuvent accéder à des grades subalternes dans l’Artillerie et le Génie), ainsi que des membres du prolétariat urbain et rural qui rêvent d’aventure et d’une meilleure paie. Seule la guerre des Boers a pu donner lieu à une levée (limitée) de volontaires, scandalisés suite aux défaites enregistrées par l’Armée face aux fermiers Afrikaneers. Mais la guerre de masse est une découverte toute récente pour les Britanniques, quasiment concomitante de l’enlisement des belligérants sur le Front de l’Ouest.

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– En 1915, après la saignée des cinq divisions d’active du BEF (pertes mal compensée par l’arrivée du Canadian Corps) engagées en France et Belgique (après la Seconde Bataille d’Ypres notamment), le Ministère de la Guerre que dirige Lord Horatio Kitchener décide de faire appel aux volontaires. A l’aide d’une propagande efficace, l’Armée britannique grossit de 500 000 volontaires fin 1915 et 3 millions en 1916. Cette armée de soldats citoyens est bientôt surnommée la « New Kitchener’s Army » (NKA), en comparaison de la Regular Army et de la Territorial Army (réserve).

– Cette levée en masse version britannique s’effectue sous la directions de Committees des Comtés (Shires) et des villes de toutes tailles, sur des bases géographiques locales certes, mais aussi sociales. Dans un pays où la conscription ne sera instaurée que tardivement (1917), les viviers de recrutement sont les différentes branches de la vie civile et même associative. Ainsi, le 1er juillet au déclenchement de la Bataille de la Somme, 75% environ des soldats engagés sont des volontaires levés dans les « Pals Battalions ». Les nouveaux engagés proviennent alors des Continuer à lire … « Les « Pals Battalions » de Kitchener et Haig »

Guerres & Histoire : l’autel d’aumônier de la Grande Guerre

A lire :
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– Dans le dernier numéro de Guerres & Histoire (juin-juillet 2016), dans la rubrique consacrée à l’équipement individuel selon les époques, Xavier Boniface* établit une description du matériel des aumôniers catholiques français, en prenant appui sur l’autel du Père Louis Lenoir SJ. X. Boniface replace aussi le contexte de la présence et du rôle des aumôniers militaires dans l’Armée de la IIIe République.

* Xavier Boniface, Docteur en Histoire, est Professeur de l’Université d’Amiens, membre du CRHAEL et auteur de « L’Aumônerie militaire française 1914-1962 » et « L’Armée, l’Eglise et la République 1871-1914 »

7 juin 1916 : le Fort de Vaux tombe avec les honneurs

– Après l’enlisement à Fleury-devant-Douaumont, comme après l’échec de la tentative de percée dans le secteur du Mort-Homme et de la Cote 304, von Falkenhayn reporte son effort sur son centre et son aile gauche, c’est-à-dire à la droite des Français. L’idée est de forcer le secteur de Vaux – Souville, derniers verrous qui permettent de déboucher sur Verdun. Si les Allemands parviennent à s’emparer de Souville, ils pourront dominer et menacer la ville et donc, la logistique de la IIe Armée.

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– Il s’agit donc pour les Allemands de percer sur les flancs de l’ouvrage, tout en mettant fin à la résistance française dans les fortifications. L’attaque contre le secteur de Vaux est confiée à trois divisions à effectifs pleins.  La 7. Reserve-Division de Bogislav von Schwerin, avec ses vétérans saxons et berlinois, doit lancer une série d’attaques contre le Bois de la Caillette (gauche de Vaux), pendant que la 1. Infanterie-Division d’Albert von Schoch doit dégager le Bois de Furmin. Enfin, la prise du Fort de Vaux et de ses environs est confiée à la 50. Infanterie-Division de Georg von Engelbrecht. Chaque division se voit rattachée une batterie d’artillerie lourde (Howitzer de 150 mm et Mörser de 210 mm) pour l’écrasement des zones fortifiées. Des téléphonistes et des observateurs d’artillerie sont également rattachés aux compagnies d’assaut. On peut voir que Continuer à lire … « 7 juin 1916 : le Fort de Vaux tombe avec les honneurs »

Jutland : la Royal Navy ferme la Mer du Nord à l’Allemagne

– Il s’agit ici de l’affrontement naval le plus important de la Première Guerre mondiale, reléguant presque le combat des Îles Falklands (1914) à un simple accrochage. La bataille du Jutland (ou Skagerrak) voit s’affronter les 31 mai – 1er juin 1916, la Royal Navy sous le commandement de Sir John Jellicoe et la Hochseeflotte commandée par l’Admiral Reinhard Scheer. Au regard des témoignages de l’époque, cet engagement d’importance – au vu des navires alignés et des enjeux – fut marqué par un déchaînement de feu et d’acier sur mer, presque comparable à ce qui se passait sur terre simultanément.
A l’issue de cet affrontement, les Allemands perdirent moins de tonnages et de marins que leurs adversaires – les pertes britanniques étant davantage dues à une imprudence de commandement – mais furent contraints au final à retirer leur marine vers les ports du Reich et à ne plus en sortir. Les quelques succès engrangés par les Allemands au cours de ces deux jours ne pourront cacher la victoire stratégique concédée à la Grande-Bretagne. Victoire stratégique qui va avoir des conséquences dramatiques sur la situation intérieure allemande.

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– Fin 1914, en dépit d’un premier succès contre les Britanniques dans le Pacifique aux Coronels, la flotte de surface de Guillaume II a essuyé un sérieux échec aux Falklands (Malouines). Et le 24 janvier 1915, la Royal Navy a bien faillir anéantir une escadre allemande au Dogger Bank, en mer du Nord. Par conséquent, l’Amirauté allemande décide d’abord de lancer ses U-Boote en mer du Nord et dans l’Atlantique, afin de harceler les convois qui convergent vers la Grande-Bretagne et la France. Sauf que cette guerre de course d’un nouveau type n’est pas sans causer des tensions internationales, qui ne jouent pas en faveur de la diplomatie allemande. Le cas le plus connu reste le torpillage du « Lusitania » (navire « neutre ») en 1915, qui scandalise l’opinion publique américaine. Si le Président Wilson maintient son pays dans la neutralité, Washington commence à percevoir la stratégie navale de Berlin comme un réel danger. A Berlin, au grand dam de von Tirpitz, Guillaume II préfère arrêter (temporairement) les opérations navales. De son côté, le commandant de la Hochseeflotte, Hugo von Bohl adopte une attitude prudente, conscient que la Royal Navy ne peut être défaite facilement. Par conséquent, il préfère poursuivre l’envoi des U-Boote en Mer du Nord et dans l’Atlantique, afin de fatiguer les unités rapides britanniques.

– Mais au début début 1916, von Bohl malade, laisse Continuer à lire … « Jutland : la Royal Navy ferme la Mer du Nord à l’Allemagne »