Le FMC 2C, ou conserver un anachronisme en 1940

Conservé dans le parc blindé français en 1940, ce char lourd d’accompagnement était alors une antiquité sur chenilles. Pourtant, le commandement décida d’engager le FMC 2 contre les Allemands… avec un résultat pour le moins pathétique. Cruelle ironie pour un engin qui avait pourtant été conçu selon la pensée militaire aboutie de la Grande Guerre.

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En 1918, l’Armée française aligne incontestablement l’un des engins blindés les plus novateurs technologiquement, le char Renault FT. Mais l’état-major se rend aussi compte que les Tanks britanniques, intégrés à un ensemble interarmes, ont puissamment contribué aux succès offensifs du dernier été de la guerre*. C’est notamment le cas du Tank Mark V, le meilleur modèle aligné par les Britanniques durant la dernière année de la Grande Guerre, le meilleur modèle de 

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Le Renault B1 bis, trop de sophistication au mauvais moment

Ces dernières années, l’historiographie militaire française  a montré que l’Arme Cuirassée française n’a pas été plus mauvaise que la Panzerwaffe, avec une dotation en matériels tout à fait honorable. En outre, les ingénieurs militaires français avaient conçu l’un des meilleurs chars de son époque : le Renault B1 Bis, véritable armurerie sur chenilles qui était capable d’égaler – sinon de surpasser – certains des Panzer de l’époque. Mais ce puissant char était trop sophistiqué, trop lent à produire, lors de son entrée en service et pas assez adapté aux nouvelles données tactiques. Et il souffrit de conceptions d’une doctrine inadéquates, caractéristiques de la pensée militaire française de l’Entre-deux-Guerres.

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1 – UN DEVELOPPEMENT TROP LONG ET TROP LENT

C’est en 1931 que le commandement français décide toutefois de passer commande de chars plus puissants que les modèles existants. Mais il faut bien avoir à l’esprit que depuis 1919, l’Infanterie a repris en main la conception d’engins blindés qu’elle conçoit dans une optique d’appui-feu de l’infanterie, s’intégrant aussi dans une doctrine défensive. Ainsi, la conception du B1 ne part absolument pas sur des bases intellectuelles faisant la part belle à la manœuvre, à l’action en profondeur et à la souplesse tactique. En octobre 1931, plusieurs projets sont présentés mais aucun n’est retenu. En janvier 1932, les avant-projets du B2, du B3 et du BB sont présentés au commandement qui les retient pour étude. La réalisation de la maquette du BB est confiée aux Forges et Chantiers de la Méditerranée (FCM) et achevée en février 1934 (les deux autres suivant l’année d’après). Le projet n’aurait peut-être pas abouti, car la conférence de la SDN sur le Désarmement (1932), initiée par

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Le projet FCM F1 : gigantisme chez les chars français

On l’a oublié mais, à l’instar de l’Armée Rouge à la même époque (mais avec de nettes nuances) et même de la Grande-Bretagne, le commandement français s’est lancé dans la conception de chars lourds à plusieurs tourelles. Mais ce gigantisme traduit les errements de responsables militaires français qui restaient cantonnés à une l’idée de char comme arme de rupture et d’accompagnement, quitte à le penser comme des sortes de béliers roulants en acier. Et ce, au détriment de chars mobiles, robustes et endurants, mieux adaptés au combat mécanisé. Enfin, ce projet s’avérera symptomatique de la lourdeur de la bureaucratie militaire française de l’Avant-guerre.

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1 – GIGANTISME, QUAND TU NOUS TIENS

A la veille de l’entrée en guerre de 1939, le Commandement Français se penche sur l’idée de créer des chars lourds pouvant neutraliser les défenses de la Siegfried Linie. Une dizaine de chars aussi lourds que lents étaient déjà sortis des ateliers, comme FMC 2C (70 tonnes) à 10 exemplaires. En 1928, on envisage la conception d’un Char d’Arrêt de 50 tonnes et en 1929 les Forges et Chantiers de la Méditerranée (FMC) accouchent même du projet d’un mastodonte blindé de 100 tonnes. En Février 1929, un nouveau projet démarre pour un char de 65 tonnes, mais il est arrêté en mai suivant pour des raisons budgétaires.

Mais le 4 mai 1936, le Conseil Consultatif de l’Armement dirigé par le Général Julien Dufieux décide d’entamer le développement d’un nouveau char lourd, selon de nouvelles 

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L’emploi des chars et canons d’assaut en Normandie – 1/3

Les exemples d’engagements blindés – dans le cadre d’opérations offensives ou défensives – ne manquent pas, même si le plus récurrent dans les récits reste le succès tactique localisé de Michael Wittmann à Villers-Bocage. On peut également souligner l’emploi des chars, avec plus ou moins de succès lors des Opérations « Epsom », « Goodwood », « Cobra » et « Bluecoat ». Pourtant, les deux camps ont utilisé leur parc blindé suivant des logiques stratégiques, opérationnelles et tactiques différentes. Ayant engagé davantage de Panzer-Divisionen que sur le Front de l’Est au même moment, la Panzerwaffe a perdu une bonne partie de son potentiel blindé en s’efforçant de tenir la ligne de front, avant d’engager des retours offensifs locaux ou tactiques, tels Mortain, avec l’insuccès que l’on sait.

S’autre part, il faut s’entendre sur le domaine sémantique. Le terme générique « blindé » se confond encore souvent avec « char d’assaut ». Or ça n’est pas tout à fait la même chose. Il faut, en effet, distinguer les termes de « chars », « tanks », « canons d’assaut » (Sturm-Geschützt en allemand), canons antichars et canons automoteurs (« self-propelled guns » pour les Anglo-Saxons). En fait, la définition de chaque engin peut se confondre tant ils peuvent être employés de la même sorte suivant les besoins. Ensuite, dans la gamme des véhicules il faut compter la gamme des canons automoteurs (dont l’emploi est différent de celui des canons d’assaut). Plutôt qu’une simple liste des engins et de chaque division engagée en Normandie, cet article propose de revenir sur l’emploi des unités blindées de chaque camp en Normandie, avec forces, limites, succès et échecs.

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1 – LES ALLEMANDS : PRIORITÉ A LA DÉFENSE. RETOURS OFFENSIFS SANS LENDEMAINS

A – UNE ARME FRAGILISÉE…

Au moment du 6 juin, le Panzer-Gruppe West (Geyr von Schweppenburg) regroupe l’ensemble des Panzer-Divisionen stationnées en France et en Belgique. Il intègre également les bataillons de chars « Tiger » indépendants (schwere-Panzer-Abteilungen), ainsi que les unités indépendantes de chasseurs de chars (Panzerjäger). La création du PzGrpe West est symptomatique de la structure quasi-féodale et concurrentielle imposée par Hitler, avec en prime le sérieux manque de vue stratégique que l’on connaît. Ainsi le Panzergruppe « West » (qui deviendra 5. Panzer-Armee* fin juin 1944) voit ses unités blindées réparties dans les zones des Heeres-Gruppen « B » et « G » alors qu’il dépend directement de l’OKH puisqu’il forme la réserve mécanisée qu’Hitler entend employer pour contrer le débarquement attendu dans le Pas-de-Calais. Du coup, Rommel n’a pas tout pouvoir sur les divisions de von Schweppenburg, lequel ne peut agir sans l’aval du Führer. A cette « usine à gaz » s’ajoutent des problèmes plus structurels. Les Panzer-Divisionen sont des unités lourdes et lentes à déplacer, malgré leur mécanisation et leur

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Le Medium Mark A Whippet

– William Tritton, ce nom ne vous dit sûrement rien. Mais si vous êtes lecteur assidu d’Acier et Tranchées depuis un peu plus de deux ans, vous l’avez déjà croisé. « Mais oui ! » vous exclamerez-vous ! « Il s’agit de l’ingénieur qui conçut le Tank Mark I sur les recommandations d’Ernest Swinton ! » Et je vous répondrai « c’est tout à fait exact. Cet homme de l’ombre qui ne connut pas les souffrances du front mais qui fut l’un des contributeurs les plus méconnus à la mécanisation de l’Armée britannique en particulier mais aussi, de la guerre en général ». C’est donc encore William Tritton qui conçut l’un des tanks les plus méconnus du public mais aussi l’un des plus intéressants, le Medium Mark A « Whippet », ce qui signifie « Lévrier ».

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1 – CONCEPTION

– La Genèse du « Whippet » commence en pleine Bataille de la Somme. Visitant le front le 20 septembre 1916 (nous sommes en plein dans les combats pour Flers-Courcelette, Le Transloy et Le Sars), Tritton reçoit alors la demande de concevoir un char léger et plus agile. L’intéressé ne sut vraiment de qui vint la demande – soi du Fieldmarschall Douglas Haig lui-même ou bien de l’état-major du BEF – mais elle fit suite au tout premier engagement des lourds et peu maniables Mark I et II. En effet, après seulement cinq jours d’engagement, les officiers britanniques se montrent particulièrement déçus par les faibles performances des engins chenillés, notamment en matière de franchissement de fossés et d’obstacles. Tritton reçoit la commande (pour/de) la conception d’un char plus léger pouvant répondre à cet impératif (1).

– Il est aussi intéressant de constater qu’un autre ingénieur, Continuer à lire … « Le Medium Mark A Whippet »