Sylvain Ferreira : « Le choc des titans. Panzerwaffe versus Armée Rouge 1941-1945 » (Caraktère)

Nous ne présentons plus Sylvain Ferreira dont nous avons relayé nombre de travaux ici. Auteur prolixe sur l’Histoire militaire, il vient de sortir, aux éditions Caraktère, une très intéressante synthèse sur la guerre blindée sur le Front de l’Est. Par « guerre blindée », il faut comprendre la gestation des équipements et des unités types, le développement des chars mais aussi des canons d’assaut (l’un et l’autre se complétant tactiquement) et l’évolution des doctrines d’emploi, allemande et soviétique.

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S’inscrivant dans un courant historiographique qui a réévalué la pensée militaire soviétique, « Le choc des titans » montre très bien comment la Panzerwaffe a constamment émoussé ses épées dans Continuer à lire … « Sylvain Ferreira : « Le choc des titans. Panzerwaffe versus Armée Rouge 1941-1945 » (Caraktère) »

Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri : « Barbarossa. 1941. La Guerre absolue » (Passés Composés)

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Un monument historiographique ! Le qualificatif n’est pas galvaudé. Après « Joukov » et « Grandeurs et misères de l’Armée Rouge », le duo formé par Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri a publié, pour la rentrée un ouvrage de plus de huit-cent pages consacré à l’Opération « Barbarossa », fruit de plusieurs années de recherche à quatre mains, au milieu d’archives allemandes et russes.

– « Barbarossa » présente la grande originalité de ne pas se concentrer exclusivement sur l’aspect militaire de l’opération. En effet, loin de n’avoir été qu’une campagne militaire stricto sensu, « Barbarossa » a été un affrontement titanesque entre deux systèmes totalitaires, avec ses dimensions politiques, géopolitiques, économiques et idéologiques. La première partie de l’ouvrage livre des lignes passionnantes sur les racines culturelles et psychologiques du plan d’invasion de Continuer à lire … « Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri : « Barbarossa. 1941. La Guerre absolue » (Passés Composés) »

Antony Beevor : « Arnhem : la dernière victoire allemande » (Calmann-Levy)

Après Stalingrad, la Normandie et les Ardennes, Anthony Beevor s’est lancé dans la rédaction d’un récit détaillé de l’Opération « Market Garden », tragédie de l’histoire militaire britannique de la Seconde Guerre mondiale.
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Appliquant sa traditionnelle méthode d’imbriquer destins personnels, anecdotes (Histoire par le bas) et sujets plus opérationnels, techniques et stratégiques (Histoire par le haut), Antony Beevor réussit à nous plonger dans les combats de Hollande pour le contrôle du Rhin. On regrette cependant qu’il ne nous détaille pas les raisons de l’abandon de l’Opération « Linnet » (abandon dû à la désobéissance de Bradley qui a voulu mener SA propre opération à Mons), lequel a incité Montgomery à lancer « Market Garden ». En revanche, A. Beevor explique très bien en quoi la nouvelle place acquise par les troupes aéroportées alliées s’est avérée être plus un handicap qu’un avantage opérationnel. L’auteur livre des lignes très intéressantes sur la planification précipitée par Montgomery (pas assez de parachutages sur les deux rives, manque d’avions et contrainte d’opérer plusieurs largages), lequel reste délibérément sourd aux avertissements des Hollandais et suscite, également, un net scepticisme dans ses rangs et chez les parachutistes américains. Mais « Monty » n’est pas le seul responsable. « Boy » Browning, Brian Horrocks, Lewis Brereton et d’autres officiers tiennent aussi les premiers rangs dans la tragédie. Et les généraux britanniques trouveront avantageux de gonfler la responsabilité des Polonais de Stanislaw Sosabowski dans l’échec du dégagement de la 1st Airborne Division à Arnhem.

A côté des ratées de la planification, Anthony Beevor montre très bien comment « Market » a vite tourné court en raison de la météorologie mais aussi, à cause d’une réaction allemande, bien menée par Model, Harmel et Harzer notamment. Réaction opérée avec des moyens limitées pour une armée que les Alliées jugeaient au bord de l’effondrement. La destruction de la division d’Urquhart fut ainsi une douche froide. Anthony Beevor n’oublie pas également de détailler chaque engagement, mettant en avant les forces et faiblesses de chacun, ainsi que l’admirable tenue du peuple hollandais. Lequel paiera très cher l’aide apportée aux alliés à l’hiver 1944-45. Comme à l’instar du film de Richard Attenborough « Un pont trop loin », le lecteur s’attache presque à certains personnages réels tels que John Frost, Joseph Vandeleur, James Gavin, Julian Cook, Kate Ter Horst, « Shan » Hackett et bien d’autres anonymes, soldats alliées et néerlandais.

« Arnhem » est donc construit comme un journal historique. Très bien écrit, il conviendra amplement à tous ceux et celles qui veulent en savoir davantage sur le dernier sanglant coup de frein infligé aux Anglo-Américains par la Wehrmacht.

Jean-Philippe Renault

 

 

Benoît Rondeau : « Être soldat d’Hitler » (Perrin)

On pense tout savoir sur la Wehrmacht. Cependant, l’armée d’Hitler (Heer, Kriegsmarine et Luftwaffe) fait encore l’objet de visions partielles et lacunaires, couplées à une forme de fascination pour le Feldgrau et les Panzer.
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Benoît Rondeau, historien spécialiste de l’Armée allemande et auteur d’une biographie d’Erwin Rommel nous propose une exploration des forces armées du Troisième Reich. L’ouvrage n’est pas une étude Continuer à lire … « Benoît Rondeau : « Être soldat d’Hitler » (Perrin) »

Nicolas Aubin : « La course au Rhin » (Economica)

– Agrégé, contributeur régulier à la revue « Guerres & Histoire » et co-auteur, avec Jean Lopez, Vincent Bernard et Nicolas Guillerat, d’une « Infographie de la Seconde Guerre mondiale » (Perrin), Nicolas Aubin s’est imposé comme l’un de nos historiens militaires les plus prometteurs. Spécialiste de la logistique du Second conflit mondial (domaine assez négligé sinon méprisé des rayons de librairie et des éditions), Nicolas Aubin vient de publier une histoire d’une partie très méconnue de la Libération de l’Ouest de l’Europe : « La course au Rhin (25 juillet – 15 décembre 1944). Pourquoi la guerre ne s’est pas finie à Noël » aux éditions Economica.
La Course au Rhin
– Comme Nicolas Aubin l’avoue lui-même dans les premières pages, la gestation de cet ouvrage a pris du temps. Mais étant donné la qualité de la recherche et celle du traitement du sujet, la Patience n’était que vertu. Lors des commémorations des évènements de la Libération en 2014, le grand public retînt les commémorations sans doute les plus médiatisées : Débarquement du 6 juin 1944, massacre d’Oradour-s/-Glane, débarquement de Provence (phase largement méconnue), libération de Paris et – peut-être – libération de Strasbourg.

– Or, beaucoup de phases intéressantes de la (reconquête) de la France par les alliés ont été largement occultées pendant plusieurs décennies par l’Historiographie : la bataille de Normandie dans son ensemble (qui s’étend jusqu’au franchissement de la Seine et la libération des ruines du Havre), la poursuite vers la Belgique, la poursuite dans la Vallée du Rhône, la campagne de Lorraine, etc.  Ici, Nicolas Aubin nous propose d’analyser ces différentes phases à la lumière de données encore trop occultées qui permettent de comprendre pourquoi ce qui apparaissait comme une chevauchée triomphale s’est émoussée au pied de Metz et un pont trop loin en Hollande. Le livre met ainsi en évidence les

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Sylvain Ferreira : « La campagne de Virginie de Grant (1864) » (Economica)

– Même si l’on connaît les noms de Lee, Grant, Lincoln ou encore celui de Gettysburg, la Guerre de Sécession reste largement méconnue en France. Force est de constater que c’est bien plus par le prisme de la question de l’esclavage que nous l’abordons. En témoigne la couverture médiatique. Or, l’histoire militaire de la Guerre civile américaine a été largement minorée sinon méprisée dans l’historiographie française. Toutefois, les travaux biographiques de Vincent Bernard sur les personnalités de Robert E. Lee et Ulysse S. Grant ont, très récemment, apporté un vent nouveau sur l’étude des campagnes de la Guerre de Sécession.
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– Dans ses biographies de Lee et Grant, Vincent Bernard a brisé plusieurs mythes tout en montrant que Grant et Lee avaient une approche différente de la Guerre. Quand le Nordiste souhaite atteindre des objectifs stratégiques et politiques (fixés par Lincoln) dans une vision plus Clausewitzienne, le Confédéré manie son armée de Virginie du Nord dans une vision plus conforme à la pensée d’Antoine de Jomini*. Ainsi, quand Grant cherche à anéantir le potentiel des Confédérés par une campagne séquencée et échelonnée dans le temps et l’espace, Lee cherche à forcer les Nordistes à la paix par une victoire décisive. Or, après sa défaite de Gettysburg, Lee n’a plus d’autre choix que d’opérer une stratégie défensive pour éviter l’invasion de son Etat natal.

– Ainsi, dans « La campagne de Virginie de Grant », Sylvain Ferreira nous offre une

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Julien Hervieux : « Le petit théâtre des opérations » (Livre)

Chers lecteurs, chères lectrices, après vous avoir infligé un ouragan, d’acier, de bombardements, d’obus et de combat, d’acier et de généraux moustachus, j’ai décidé de tenir ici un propos plus léger. Enfin, tout dépendra du propre point de vue de chacun, comme le dit si bien un maître jedi…

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– Tout d’abord, voyons comment m’est venue l’idée de cette recension. En raison d’horaires matinaux impossibles en semaine, je me retrouve bien souvent désœuvré l’après-midi. Du coup, je dois combler ce Continuer à lire … « Julien Hervieux : « Le petit théâtre des opérations » (Livre) »

Colonel Michel Goya : « Les vainqueurs. Comment la France a gagné la Grande Guerre »

Membre de la rédaction de la revue « Guerres & Histoire », animateur du blog « La voie de l’épée » et auteur de plusieurs ouvrages de référence sur l’Histoire militaire (« La chair et l’acier : l’armée française et l’invention de la guerre moderne, 1914-1918 » ; « Irak : les armées du chaos » ; « L’invention de la guerre moderne : du pantalon rouge au char d’assaut, 1871-1918 » ) le Colonel Michel Goya vient de publier chez Tallandier, son dernier ouvrage : « Les vainqueurs. Comment la France a gagné la Grande Guerre ». Pour nous, avec son titre qui annonce la couleur, le livre est clairement incontournable en cette dernière année du Centenaire.

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– Depuis bien longtemps, la mémoire – individuelle ou collective – a surtout vu la Grande Guerre à travers le prisme de la souffrance des Poilus dans les tranchées ou bien à travers celui de l’absurdité. Absurdité de la guerre, absurdité des ordres, etc. Par conséquent, on a oublié pendant longtemps que l’Armée française de 1918 était devenue la plus Continuer à lire … « Colonel Michel Goya : « Les vainqueurs. Comment la France a gagné la Grande Guerre » »

Entretien avec Sylvain Ferreira : « L’inévitable défaite allemande »

– Journaliste et historien spécialiste de l’histoire militaire des grands conflits de l’Epoque Contemporaine, Sylvain Ferreira coopère comme rédacteur aux revues « Batailles et Blindés » et « Ligne de Front » et « Los ! » (éditions Caraktère) et aussi au site « Theatrum Belli ». Il opère également comme consultant pour l’émission « Champs de Bataille ». Il a également publié deux ouvrages sur la Grande Guerre : « L’expédition française aux Dardanelles » et « La Marne, une victoire opérationnelle » (éditions Lemme).

– Avec son dernier ouvrage intitulé « L’inévitable défaite allemande. Mars – juillet 1918 », Sylvain Ferreira revient sur les trop méconnues offensives Ludendorff du printemps et de l’été 1918. Sans s’attarder sur les détails de chaque phase de combats, l’ouvrage propose une synthèse bienvenue ayant comme problématique l’aveuglement de Ludendorff quant à l’art opérationnel (ou opératif) ; le Quartier-Maître Général allemand n’ayant conduit la guerre que par le prisme tactique. Nous avons lu le livre en avant-première et Sylvain Ferreira a aimablement accepté de s’entretenir pour Acier et Tranchées.

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1 – Sylvain Ferreira, pouvez-vous nous rappeler, pour commencer, ce qu’est l’art opérationnel ?

– Même si personne n’a encore défini précisément ce qu’est l’art opérationnel de la même manière que la stratégie ou la tactique, je dirai qu’il s’agit de l’articulation entre les deux et qu’il est apparu suite à la disparation progressive de la notion de bataille sur un point fixe à partir du Continuer à lire … « Entretien avec Sylvain Ferreira : « L’inévitable défaite allemande » »

« Michael » : l’Archange pour l’offensive de la dernière chance – Quatrième partie

LE CALVAIRE DE LA FIFTH ARMY BRITANNIQUE –

Le 21 mars, au QG d’Avenes-sur-Help, tout le monde est à la fête. Tactiquement, le succès est (presque) au rendez-vous. Si la Third Army résiste encore, la Fifth peut s’écrouler sous les coups de boutoir des Sturmtruppen. En à peine une semaine, les troupes de Gough vont subir un véritable calvaire qui mènera l’alliance franco-britannique au bord de la catastrophe. Mais aussi brutale et rapide soit-elle, l’offensive allemande va s’essouffler et buter sur la rapidité de la réaction alliée. Et, malgré les succès tactiques allemands, la ville de Montdidier deviendra le dernier rempart avant Paris et la Manche.


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1 – LE ROULEAU  COMPRESSEUR ALLEMAND

Le 22 mars, après avoir percée la première ligne britannique en plusieurs points, les trois armées allemandes s’apprêtent à fondre sur la seconde ligne. Pendant la nuit, il faut relever les régiments d’assaut les plus fatigués. Les régiments de réserve prennent alors position dans les secteurs acquis lors de l’assaut du 21 mars. Le lendemain, durant la matinée, l’assaut reprend encore plus furieux. Dans le secteur de la XVII. Armee, von Below décide d’accentuer l’effort sur son flanc droit, entre la « Colline du moulin » au nord de Croisilles, avec la 6. Königlich-Bayerische-Division (). Mais si Croisilles finit par tomber, les Britanniques bloquent encore les Allemands sur Vraucourt. Haig ordonne alors à Byng de contre-attaquer contre le Gruppe « Lindequist » sur la ligne Havrincourt – Flesquières, afin de maintenir le contact avec la Fifth Army. Sauf quasi-simultanément, von der Marwitz relance sa II. Armee à l’attaque entre Gouzeaucourt et Vermand. Comme pour la veille, l’attaque est menée par les Continuer à lire … « « Michael » : l’Archange pour l’offensive de la dernière chance – Quatrième partie »