L’hydravion « Felixstowe » F.2 et F.2A

Une merveille de technologie aéronautique de la Première Guerre mondiale : l’hydravion biplan « Felixstowe » F.2A qui se révéla fort utile à la lutte anti sous-marine et à la surveillance des convois. Les faits d’armes de ses pilotes durant la Grande Guerre resteront bien sûr dans l’ombre des as du RFC mais le « Felixstowe » servira de base à la conception de plusieurs hydravions, dont le « Catilina ».

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– Avec la guerre menée contre les Unterseeboote et les Zeppelins du Kaiser, les Britanniques arrivent rapidement à la conclusion qu’ils ont besoin d’avions à plus long rayon d’action et à plus grande autonomie, afin d’équiper décemment le Royal Navy Air Squadron (les unités aériennes de la Royal Navy). Ils achètent d’abord aux Etats-Unis des Curtiss H4 et H8 américains, suivis par de H12 surnommés respectivement « Small America » puis « Large America ». Mais les deux modèles manquent de puissance et leur conception doit être revue (1).

– Cette tâche d’ingénierie est dévolue au  Continuer à lire … « L’hydravion « Felixstowe » F.2 et F.2A »

La stratégie des convois, victoire des Alliés sur les torpilles

Le début de l’année 1917 est marqué par une sensible escalade dans la guerre navale. Suivant les données et conseils (mal avisés) de l’Amiral Henning von Holtzendorff, Erich Ludendorff convainc Guillaume II de déclencher « la Guerre sous-marine à outrance » afin de répondre au blocus imposé à l’Allemagne par la Royal Navy. Les stratèges du Guillaume visent à affamer la Grande-Bretagne en coulant 6 millions de tonneaux afin de la contraindre à s’asseoir à la table des négociations pour demander grâce. Pour cela, Ludendorff ordonne aux commandants d’Unterseeboote de torpiller ou attaquer tous les navires de commerce (même les neutres) qui font vapeur ou voile vers les ports anglais. Et pour ainsi dire, les quatre premiers mois de 1917 vont donner des sueurs froides à Londres et Paris. Mais plusieurs éléments conjugués vont réduire à néant les efforts des sous-mariniers allemands : l’imagination de responsables navals français ; les efforts britanniques malgré les réticences des responsables navals, ainsi que l’entrée en lice de la troisième marine du monde ; l’US Navy.

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1 – CHARBON ET NAVIRES MARCHANDS NORVÉGIENS

– Mis en place à partir de 1917, le système d’escorte des convois maritimes dans l’Atlantique découle de tentatives effectuées par la Royal Navy depuis 1914. On l’oublie, les Britanniques faisaient escorter des navires neutres, notamment Hollandais  et scandinaves face à la menace des flottilles de surface allemandes. En 1916, chaque convoi relie la Grande-Bretagne à la Hollande tous les deux jours encadrés par 4 à 9 navires de l’Harwich Force du Vice-Admiral Tyrwhitt. C’est ce qu’on appelle le « Beef trip » (« voyage du bœuf »), qui devient l’activité principale de l’Harwich Force, au grand dam de Tyrwhitt (1).

– Deux Français vont apporter un concours précieux. D’une part le Capitaine de Vaisseau Vandier qui est l’un des initiateurs de la protection des convois de charbon. Le  7 janvier 1917, dans une étude minutieuse remise à l’Admiralty, il développe son argumentation pour obtenir que ce système des convois soit, dans un premier temps, mis en place pour acheminer le charbon d’Angleterre  en France. Voici ce que dit Vandier : Continuer à lire … « La stratégie des convois, victoire des Alliés sur les torpilles »

« Q-Ships » ou « Bateaux pièges» ; le retour des corsaires (1914-1918)

Et si l’on vous disait que de modestes navires marchands (apparemment) inoffensifs et d’élégants voiliers ont été utiles pour traquer des U-Boote dans les eaux froides de la Manche et de l’Atlantique nord, vous ririez. Autrement, vous croiriez encore à l’une de ces lubies fantaisistes de certains officiers excentriques qui peuplent l’histoire militaire britannique… Et pourtant, il faut bien le dire, ces navires « civils » obtiendront un honorable palmarès dans la traque aux sous-marins ; nettement supérieur à celui de ces formidables machines de mort qu’étaient les « Dreadnoughts » et « Battlecruisers » et qui feront surtout parler d’eux qu’au large du Jutland, sans plus connaître de bataille navale digne de ce nom pendant le reste du conflit. En revanche, les  « Q-Ships » ont constamment opéré à partir de leur création et jusqu’à la fin du conflit. En somme, ils furent l’ingénieuse – et moins coûteuse – réponse de l’Admiralty à l’insidieuse guerre de prédateurs qu’a lancé sa rivale germanique. Une réponse dont Ian Flemming aurait peut-être pu s’inspirer s’il avait été témoin direct de cet épisode…

– Il ne faut pas croire que les Britanniques ne disposent pas de submersibles quand la guerre est déclarée. Au contraire, la Royal Navy en aligne plusieurs dizaines (58 de Classe E, 7 de Classe J et ceux de Classe K en développement) mais nettement moins que sa rivale la Hochseeflotte. Il faut dire que la doctrine navale britannique, établie par Sir Julian Corbett, mise sur des bateaux rapides mais bien armés qui soient capables d’être envoyés aux quatre coins des océans afin de protéger les routes commerciales. Et les sous-marins sont vus davantage comme des engins d’appui. A contrario, après avoir dû rudement digéré sa défaite dans la « course aux armements », la Kaiserliche Marine se lance dans le développement des U-Boote. Plusieurs cerveaux germains ayant  vite compris que ces engins au mode de déplacement discret pouvaient faire peser une sérieuse menace sur la puissante Royal Navy. Par conséquent, si elle dispose que de 24 U-Boote en août 1914, la marine allemande passe rapidement commande de nouveaux engins.

– Au début du conflit, la chasse aux sous-marins allemands dans la Manche est confiée à des escadres (la 2e légère pour la France) qui emploient des sous-marins le jour et des torpilleurs la nuit, afin d’éviter la confusion des cibles. Britanniques et Français mouillent des câbles et des filets d’acier au large des côtes flamandes mais ces mesures sommaires son inefficaces, d’autant que les allemands viennent de doter leurs engins de dents spéciales pour sectionner les obstacles filaires. Les mines se montrent plus efficaces mais nombre d’engins ennemis réussissent à torpiller des navires dans l’Atlantique. Du coup, quand les loups de mer passent entre les mailles du filet, il faut leur donner la chasse. Mais comment ?

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1 – LA NAISSANCE

– L’Amirauté pense que le seul moyen de venir à bout des U-Boote est de lancer une campagne navale offensive. Cette assertion vient du fait que les Battlecruisers de la Grand Fleet nécessitent une protection rapprochée de destroyers armés de torpilles. Or ces derniers vaisseaux sont d’abord conçus pour affronter d’autres destroyers et non des sous-marins. Entre 1914 et 1917, les destroyers-torpilleurs n’affichent un score que de 6 U-Boote sur 142 engagements. En outre, à la vue de navires de

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Avions en mer ; quand la Grande-Guerre invente l’aéronavale – Partie 2

3 – LA TORPILLE PREND L’AIR

– Les attaques de navires à la bombe s’avérant infructueuses, les belligérants misent plutôt sur des torpilles embarquées sur des avions. Mais compte-tenu du poids de l’engin qui peut handicaper l’appareil en vol – le contraignant à ne pas voler au-delà d’une certaine altitude – aucun appareil ne peut embarquer plus d’une torpille. Du côté des Empires Centraux, les Allemands et les Austro-Hongrois répondent aux Britanniques. Les premiers conçoivent l’hydravion « Gotha » WD. 14, chargé d’attaques à la torpille contre des navires. Produit à 69 exemplaires en tout, il est néanmoins vulnérable aux ripostes de chasse.

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Hydravion allemand Gotha WD.14

– Du côté britannique, le Commodore Murray Sueter se  fait l’avocat de l’emploi d’avions torpilleurs contre les flottes allemande et austro-hongroise. Placé à la tête de l’Air Department, le Commodore Murray Sueter convertit, dès 1914, 3 AD-1000 en torpilleurs (avions de reconnaissance à long rayon d’action inspirés des Sikorsky). Mais l’engin se révèle inadéquat. Du coup, Sueter fait appel au concepteur d’avions Frederick Handley-Page qui travaille sur Continuer à lire … « Avions en mer ; quand la Grande-Guerre invente l’aéronavale – Partie 2 »

Avions en mer ; quand la Grande-Guerre invente l’aéronavale – Partie 1

– Quand on pense au mot « aéronavale », nous viennent très vite en tête les images des grands affrontements de la Guerre du Pacifique entre Américains et Japonais. Mais comme pour beaucoup d’aspects de la Seconde Guerre mondiale, l’aéronavale a bien eu ses précédents et ses pionniers durant la Grande Guerre et même avant. En effet, c’est à la fin de la Belle Epoque que l’on découvre le potentiel des avions dans une potentielle future guerre navale. L’élément naval, qui était jusque-là l’apanage des cuirassés et autres dreadnoughts, se retrouve « relié » à l’élément aérien. L’emploi des appareils en mer reste en effet bien moins « médiatisé » que les affrontements au-dessus du front de l’Ouest, car peu spectaculaire en comparaison des exploits des « as ». Mais il s’intègre dans un processus de réponses à de nouvelles menaces (sous-marins, Zeppelin) qui engendre de nouvelles techniques d’emplois, qui elles-mêmes donnent naissance à de nouveaux types d’avions et de vaisseaux.

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Décollage d’un Sopwith « Pup » sur ne plateforme installée sur le croiseur australien « Sydney »

1 – QUAND L’AVION CONTESTE LE RÈGNE DES GRANDS CUIRASSES  

– Au début du XXe siècle, une bonne partie des officiers considère que les cuirassés et autres dreadnoughts sont les « armes absolues » sur mer. Et on estime alors  que l’aviation n’est rien d’autre que du sport pour officiers oisifs. Pourtant, les innovations techniques propres à la fin de la Belle Epoque font des émules chez les jeunes officiers et certains responsables militaires. Et l’aéronautique navale en fait partie. Winston Churchill pour la Grande-Bretagne, le Rear-Admiral Bradley A. Fiske pour l’US Navy, René Daveluy et Paul Teste pour la France, ainsi qu’Alessandro Guidoni et Mario Caldarera pour l’Italie sont les promoteurs de ce nouvel emploi des biplans (1). Du côté des « conservateurs », sévères gardiens du dogme de l’emploi du cuirassé, on s’agace de voir les dossiers « novateurs » s’accumuler sur les étagères des différents bureaux des états-majors navals d’Europe.
Seulement, l’évolution de l’aviation va donner raison aux thuriféraires de l’aéronautique. Si en 1908 l’Amirauté britannique a raison d’estimer que Continuer à lire … « Avions en mer ; quand la Grande-Guerre invente l’aéronavale – Partie 1 »

La Marine du Soleil levant en Méditerranée (1917-1918)

On a tendance à l’oublier mais l’Empire du Japon, « réveillé » par l’Ere Meiji et puissance montante en Extrême-Orient et dans le Pacifique depuis sa victoire sur la Russie en 1904-1905, est entré en guerre aux côté des forces de l’Entente dès 1914. Rappelons que l’Empire de Yoshihito (Taisho Tenno) est l’allié de Londres dans le Pacifique. « Fille » du dynamisme industriel de l’ère Meiji, la Marine impériale nippone a d’ailleurs bénéficié de l’aide d’ingénieurs et d’officiers britanniques, ce qui s’est avéré fort utile lors de la retentissante victoire de Tsushima. Avant 1914, la Marine japonaise est l’une des plus puissantes au monde, disputant la troisième place à l’US Navy, juste derrière la Royal Navy et la marine allemande mais nettement devant la française.  De plus, les Japonais qui ne cessent de lorgner sur l’agonisant et déclinant Empire Qinq, depuis le traité de Shimonoseki (1895) veulent étendre leur influence commerciale en Asie. Or, Tokyo se heurte vite aux prétentions outre-mer de l’Allemagne de Guillaume II. Les Japonais veulent s’implanter dans la province du Shandong mais les Allemands y sont déjà bien installés avec la construction du port de Qingdao (ou Tsing-Tao). La Grande-Bretagne, qui ne serait guère fâchée de voir l’Allemagne quitter le Pacifique soutient donc Tokyo.

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Destroyer de la classe « Kaba » ici en Méditerranée (probablement au large de l’Italie ou de la Grèce)

– Ainsi, de septembre à novembre 1914, les forces de l’Amiral Kato Sadakichi et du Général Kamio Mitsuomi font le siège du port allemand qui finit par se rendre. Mais si l’Armée de Terre nippone (formée en partie « à l’allemande ») ne sera guère employée, la Marine impériale continue de servir aux côtés des Alliés durant le conflit. Ainsi, elle participe à la traque des derniers navires allemands dans le Pacifique et contribue à la prise de Continuer à lire … « La Marine du Soleil levant en Méditerranée (1917-1918) »

Jutland : la Royal Navy ferme la Mer du Nord à l’Allemagne

– Il s’agit ici de l’affrontement naval le plus important de la Première Guerre mondiale, reléguant presque le combat des Îles Falklands (1914) à un simple accrochage. La bataille du Jutland (ou Skagerrak) voit s’affronter les 31 mai – 1er juin 1916, la Royal Navy sous le commandement de Sir John Jellicoe et la Hochseeflotte commandée par l’Admiral Reinhard Scheer. Au regard des témoignages de l’époque, cet engagement d’importance – au vu des navires alignés et des enjeux – fut marqué par un déchaînement de feu et d’acier sur mer, presque comparable à ce qui se passait sur terre simultanément.
A l’issue de cet affrontement, les Allemands perdirent moins de tonnages et de marins que leurs adversaires – les pertes britanniques étant davantage dues à une imprudence de commandement – mais furent contraints au final à retirer leur marine vers les ports du Reich et à ne plus en sortir. Les quelques succès engrangés par les Allemands au cours de ces deux jours ne pourront cacher la victoire stratégique concédée à la Grande-Bretagne. Victoire stratégique qui va avoir des conséquences dramatiques sur la situation intérieure allemande.

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– Fin 1914, en dépit d’un premier succès contre les Britanniques dans le Pacifique aux Coronels, la flotte de surface de Guillaume II a essuyé un sérieux échec aux Falklands (Malouines). Et le 24 janvier 1915, la Royal Navy a bien faillir anéantir une escadre allemande au Dogger Bank, en mer du Nord. Par conséquent, l’Amirauté allemande décide d’abord de lancer ses U-Boote en mer du Nord et dans l’Atlantique, afin de harceler les convois qui convergent vers la Grande-Bretagne et la France. Sauf que cette guerre de course d’un nouveau type n’est pas sans causer des tensions internationales, qui ne jouent pas en faveur de la diplomatie allemande. Le cas le plus connu reste le torpillage du « Lusitania » (navire « neutre ») en 1915, qui scandalise l’opinion publique américaine. Si le Président Wilson maintient son pays dans la neutralité, Washington commence à percevoir la stratégie navale de Berlin comme un réel danger. A Berlin, au grand dam de von Tirpitz, Guillaume II préfère arrêter (temporairement) les opérations navales. De son côté, le commandant de la Hochseeflotte, Hugo von Bohl adopte une attitude prudente, conscient que la Royal Navy ne peut être défaite facilement. Par conséquent, il préfère poursuivre l’envoi des U-Boote en Mer du Nord et dans l’Atlantique, afin de fatiguer les unités rapides britanniques.

– Mais au début début 1916, von Bohl malade, laisse Continuer à lire … « Jutland : la Royal Navy ferme la Mer du Nord à l’Allemagne »