« Le tigre du Ciel » (« Aces High »), Jack Gold (1976)

Film de guerre britannique quasiment passé dans l’oubli, remake de « La fin du voyage » (J. Whale, 1931), « Le tigre du Ciel » aurait pu s’intituler « Vie et mort des pilotes britanniques de la Grande Guerre ». Bien moins connu que l’hollywoodien « Le crépuscule des aigles » (J. Guillermin), le film de Jack Gord relate la vie d’un groupe d’officier d’un Squadron du Royal Flying Corps en 1916-1917. Son mérite est de montrer la guerre des pilotes et donc, pas seulement depuis les postes de pilotage mais avec la vie de base et les temps de permission.

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Ni pro-guerre ni antimilitariste, « Le tigre et du ciel » est sorti durant une période de l’histoire du cinéma où les films de guerre n’avaient plus la cote dans le monde anglo-saxon, surtout après la fin de la Guerre du Vietnam. Pourtant, le film de Jack Gold offre peut-être une vision assez juste et humaine d’un pan de l’histoire militaire de la Grande Guerre qui est longtemps resté connu sous l’angle des combats aériens « mythifiés » comme la dernière épopée chevaleresque d’une aristocratie militaire européenne. L’historiographie a fait lit de cette mythologie pour montrer que dès 1915, la guerre aérienne s’est « brutalisée » (pour reprendre le terme cher à George Mosse).

Le film s’ouvre sur une 

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De la Moselle à la Sarre : l’insuccès de Patton sur le West-Waal (Nov-Déc 1944)

Durant toute la première moitié de décembre, forte de la chute de Metz, la Third US Army de Patton va s’efforcer de franchir la Sarre, dont le franchissement assurerait aux forces alliées le contrôle d’un bassin industriel et minier du Troisième Reich. Patton pense, à tort, que les Allemands sont tout près de l’effondrement et qu’ils seront incapables de résister. Grisé par son succès et obnubilé par une sorte de mirage, il imagine toujours pouvoir obtenir un succès stratégique qui précipiterait la fin de la guerre avant Noël. Mais le manque de moyens de son armée, le mauvais temps et la défense de la Heer, plus robuste qu’imagine, vont mener à un échec opérationnel net. Échec masqué par la prise de Metz mais qui est à replacer dans un contexte plus stratégique.

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1 – OPTIONS

Suite à la chute de Metz, Patton est alors optimiste. Après 13 jours de combat, les avant-gardes du XX US Corps signalent peu de résistance au nord entre Sarrebourg et Sarrelouis. Patton décide d’en profiter. Il assigne à Walker l’objectif de Merzig, ville située entre les deux villes mentionnées. Hélas, Bradley refuse de lui céder la 83rd US ID (R.C. Macon). C’est donc seulement avec 2 divisions (10th Armored et 90th US ID), dont une sérieusement entamée, que Walker commence la manœuvre en attendant les renforts de Metz. Dans le même temps, Patton décide de relancer l’attaque du XII US Corps en direction de Sarrebrück, espérant qu’en engageant son armée sur un large front, les lignes allemandes craquent d’un moment à l’autre. Le 27 novembre, pensant que Patton tient un succès opérationnel, qui pourrait être couplé avec un autre venu du 6th US Army Group (Seventh US Army et Ire Armée française) en Alsace, Eisenhower ordonne que la Third US Army investisse le Bassin de la Sarre, ce qui priverai l’Allemagne nazie de mines et d’industries. « Ike » assigne alors à Patton l’objectif de Sarre-Union. A ce stade de la campagne, le front de l’armée de Patton s’étend de Béning-lès-Saint-Avold (aile gauche du XX Corpsjusqu’à Mackwiller, à la soudure avec l’aile gauche de la Seventh US Army d’Alexander M. Patch (XV US Corps). Le 1er décembre, Patton publie une directive opérationnelle confiant une nouvelle offensive aux 35th US ID, 80th US ID et 6th Armored Division, soit la gauche du XII US Corps, pour le 4. L’objectif d’Eddy est de percer la partie de la Ligne Maginot qui surveille la Sarre au nord-est de Farbersviller. La 6th Armored doit avancer sur Sarreguemines, tandis que son flanc gauche – en jonction avec la 80th US ID –  doit s’emparer du plateau de Cadenbronn qui domine la Sarre. Heureusement, les troupes allemandes qui gardent le secteur sont 

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De la Moselle à la Sarre : la prise de Metz (novembre 1944)

Durant tout le mois d’octobre, suite à l’échec d’Arnhem et à la stagnation du front britanniques sur l’Escaut, Patton a été contraint de ronger son frein. Mais il reste obnibulé par deux objectifs : prendre Metz et porter le fer en Allemagne. Patton l’ambitieux projet de franchir la Sarre et d’atteindre le Rhin – voire Francfort – après avoir forcé la Ligne Maginot et le Westwall. L’attitude du général américain s’en ressent même. Il s’isole de longues heures dans son bureau d’état-major en fixant ses cartes. Il y a clairement une question d’ego dans son projet. Patton veut être le premier général allié à entrer en Allemagne afin de convaincre Eisenhower de bien fondé de son entreprise. Mais aussi pour damer le pion à Montgomery – qu’il déteste – en perte de crédibilité suite à l’échec en Hollande.

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1 – CONTEXTE OPÉRATIONNEL ET PLANS AMÉRICAINS

Fin octobre 1944, Patton se montre enthousiaste. La raison ? Omar N. Bradley, commandant du 12th US Army Group (First et Third US Armies) a octroyé la priorité du ravitaillement à Patton. Actant de l’enlisement sanglant dans les secteurs d’Aix-la-Chapelle et de la Forêt d’Hürtgen, Bradley s’est rangé à l’option défendue par Patton depuis la fin de l’été, soit de percer sur la Sarre pour pénétrer sur le territoire allemand. Du coup, Bradley donne priorité des fournitures à la Third US Army, ce que lui accorde Eisenhower. Patton reçoit ainsi 2 000 tonnes de ravitaillement par jour en plus de l’appui de plusieurs unités d’appui tactique de la IX USAAF, notamment du redoutable XIX Tactical Air Command. Ce dernier ayant pu se constituer plusieurs aérodromes pour ses chasseurs-bombardiers en Champagne. En revanche, Bradley détourné le VIII US Corps de Troy H. Middleton (occupé à Brest en septembre) vers la First US Army de Hodges pour l’engager dans la Forêt d’Hürtgen. Résultat, le dispositif de Patton ne s’en trouve pas renforcé, puisqu’il doit compter sur seulement deux Corps, là où Hodges peut en compter 4. Mais Bradley a octroyé à Patton le contrôle opérationnel de la 83rd US Infantry Division (R.C. Macon) qui fait face à la ligne Grevenmacher – Sarrebourg – Remich et qui forme la « soudure » entre l’aile droite d’Hodges et l’aile gauche de Patton. Comme l’explique toujours Nicolas Aubin, Patton et son état-major piloté par

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« Midway » par Roland Emmerich. Encore du grand spectacle pétaradant. Mais…

Roland Emmerich a son public, c’est certain. Il faut dire que le réalisateur de films tels « Independance Day » (I et II), « The Patriot » ou encore « 2012 » ne fait pas l’objet de salves favorables de la part des critiques, dont le feu se concentre sur son goût pour une mise en scène spectaculaire, avec l’appui immodéré d’effets spéciaux. Il est également souvent brocardé pour ses opinions sur une hypothétique fin du monde ou encore, sur son fétichisme guerrier (voire militariste pour certains). Toutefois, Acier & Tranchées ne prétend pas se mettre à la place de critiques de cinéma, sûrement bien plus habilités que nous à livrer une critique plus complète du film. Nous nous contenterons de relever les défauts techniques du film qui nous ont paru être soulignés. Cela dit, le propos de cet article est de commenter le film d’Emmerich à travers le prisme de l’Histoire militaire.

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– En cette année 2019, Emmerich a décidé de revenir à une dimension plus historique, avec « Midway ». Cette bataille aéronavale décisive avait déjà fait l’objet d’un traitement cinématographique en 1976. « La bataille de Midway » de Jack Smight, avec Charlton Heston, Henry Fonda, Glenn Ford, Robert Wagner et Toshirô Mifune, reste encore un très bon film de guerre qui s’attache à raconter l’ensemble de la bataille de Midway. Même si le film utilise des « stock shots » d’images d’archives et d’autres films, il reste quand même intéressant à visionner, en dépit de son âge. Avec son « Midway », Roland Emmerich offre, comme l’on pouvait s’y attendre, un film de guerre à grand spectacle et à grands renforts d’effets spéciaux. Mais cette fois, c’est à bien meilleur escient que de précédentes productions.

[NB : les paragraphes qui suivent révèlent des éléments du films.]

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Sylvain Ferreira : « Le choc des titans. Panzerwaffe versus Armée Rouge 1941-1945 » (Caraktère)

Nous ne présentons plus Sylvain Ferreira dont nous avons relayé nombre de travaux ici. Auteur prolixe sur l’Histoire militaire, il vient de sortir, aux éditions Caraktère, une très intéressante synthèse sur la guerre blindée sur le Front de l’Est. Par « guerre blindée », il faut comprendre la gestation des équipements et des unités types, le développement des chars mais aussi des canons d’assaut (l’un et l’autre se complétant tactiquement) et l’évolution des doctrines d’emploi, allemande et soviétique.

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S’inscrivant dans un courant historiographique qui a réévalué la pensée militaire soviétique, « Le choc des titans » montre très bien comment la Panzerwaffe a constamment émoussé ses épées dans Continuer à lire … « Sylvain Ferreira : « Le choc des titans. Panzerwaffe versus Armée Rouge 1941-1945 » (Caraktère) »