– Comme souligné en détail dans un précédent article, l’enlisement des belligérants dans les tranchées franco-belges et alpines va donner lieu à une adaptation de la conduite de la guerre, en même temps qu’une « démodernisation » couplée à la réapparition d’armes tout droit sorties de l’Époque médiévale. Couteaux, poignards, dagues et autres « trench clubs » vont très vite trouver leur emploi dans de nouveaux types de missions que redécouvrent les armées étatiques de la fin XIXe – début XXe : les coups de mains, que les britanniques appellent « raids ». En outre, l’enlisement de la guerre sur les fronts franco-belge et italien entraîne nécessairement une volonté des commandements alliés (moins du côté allemand, conformément à la stratégie défensive de von Falkenhayn) de sortir de l’ornière de la guerre des tranchées en perçant la ligne adverse. D’où une nécessité de « voir ce qu’il y a derrière la tranchée d’en face », si l’on ose un pastiche des mots du Duc de Wellington. Cette nouvelle façon de mener la guerre dans la Grande Guerre va également donner naissance à des combattants d’un nouveau type, avec des tâches et des compétences plus spécialisées que le fantassin de ligne. « Corps francs », « Groupes francs » ou encore « Sections franches » pour les français ; « Raiders » ou « Night squads » pour les Britanniques, Canadiens, Australiens et Néo-Zélandais. Ces unités constituées à partir d’éléments régimentaires ou au sein des Battalions de Sa Majesté se différencient des « Sturmtruppen » ont, en résumé, une fonction d’infiltration dans les premières lignes adverses afin de permettre la percée.Et ces types d’unités ont bien entendu alimenté la littérature de guerre et d’après-guerre. On les retrouve chez Read, Sassoon et bien sûr, avec le Capitaine Conan de Roger Vercel. Effectuons donc un retour sur ses soldats qui ont préfiguré les forces spéciales du XXe siècle (1)
– A la veille du déclenchement du conflit, l’Armée de la IIIe République ne songe pas un instant à mettre sur pied des petites unités dévolues à des tâches spéciales et risquées. L’École de Guerre et l’État-major estiment que la « Reine des batailles » doit constituer un corps homogène, idéologiquement et militairement parlant. En effet, l’Armée de la République souhaite former, avec la conscription, un creuset démocratique de citoyens soldats. Or, comme le dit Jean-Dominique Merchet (2), l’Armée de la République voit d’un très mauvais œil la création d’unités d’élite formée de volontaires dans lesquelles elle perçoit une résurgence aristocratique. Mais la réalité de la guerre rattrape vite le commandement. En effet, comme le dit le Colonel Goya, avec la stabilisation du conflit, « on découvre une Continuer à lire … « Raids et patrouilles nocturnes : activités « spéciales » du no man’s land »