Douglas Haig

Peu de chefs militaires britanniques auront connu une aussi forte controverse post mortem que Douglas Haig. D’abord célébré en héros lors de ses obsèques, il sera dénigré et affublé des surnoms de « boucher de la Somme » comme de « pire stratège de la Première guerre mondiale » durant les années 1960-1970. Durant les vingt dernières années, les biographes de Haig s’entre-déchiraient encore sur le personnage. Ces défenseurs comme Thomas Bourne le tiennent pour le général qui a su moderniser l’Armée britannique pour en faire une superbe arme en 1918. En revanche, son plus féroce détracteur, Dennis Winter l’accuse littéralement d’avoir falsifié la vérité historique dans la rédaction de ses mémoires. Winter dresse de lui un portrait noir, celui d’un officier qui ne dut sa carrière qu’à son réseau politique et un officier incapable. Pour cet article, tâchons de nous en tenir aux faits et à ce qui est avéré.

Field Marshal Douglas Haig, Earl Haig
– Douglas Haig, 1st Earl Haig voit le jour le 19 juin 1861 à Edinburgh dans le quartier de Charlotte Square. Contrairement à nombre de ses futurs collègues officiers, il n’est aucunement issu de l’Aristocratie militaire britannique. Son père John Haig est le propriétaire de la distillerie de Whisky Haig & Haig. Malgré un intérêt prononcé pour la Continuer à lire … « Douglas Haig »

La Défense française de Verdun en janvier 1916

1 – LES FORTS : UN SYSTÈME IMPRESSIONNANT…

– Verdun possède encore l’un des plus puissants systèmes de fortifications d’Europe. Plusieurs forts possèdent des carapaces renforcées résistant aux obus de l’artillerie lourde allemande. D’importants travaux ont débuté dès 1873 (Seré de Rivières) et se sont poursuivis jusqu’en 1913 pour la construction d’ouvrages plus modernes, ou pour la rénovation de certains déjà existants.

– Durant les années 1880-1890, les ouvrages construits sont d’abord maçonnés. Ceux construits ou modernisés à la toute fin du XIXe siècle bénéficient d’une protection en béton armé, beaucoup plus résistant. Certains forts et ouvrages se voient également coiffés de coupoles et de tourelles à éclipse. On fait aussi creuser des abris souterrains et des abris cavernes afin d’offrir une meilleure protection aux hommes comme aux munitions en cas de bombardements massifs. Entre chaque fort, sont creusés 24 abris d’Infanterie (désignés sous l’identification FT). On construit également les nouvelles casemates dite « de Bourges » (car testées au polygone de tir de la ville éponyme). En 1909, un dernier programme de modernisation est lancé après la visite d’inspection du Général Henry de Lacroix (alors Vice-président du CSG) en vue de construire de nouvelles tourelles, ainsi que des « centres de résistance ». Ces derniers consistent à ceinturer un fort d’abris et de batteries bétonnées (Douaumont, Rozelier, Bois-Bourrus). Mais le programme est interrompu par la déclaration de guerre.

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La Région Fortifiée de Verdun compte trois puissants secteurs disposés des deux côtés de la Meuse, protégeant les accès de la ville par le nord, l’est et le nord-est. Chaque secteur est formé d’un ensemble comprenant une ligne de surveillance (ouvrages défensifs), une position principale (forts et ouvrages) et une position de soutien (forts et ouvrages). En voici le détail (voir carte) :

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La campagne britannique de Mésopotamie (1)

– Les récentes guerres du Golfe et l’actuelle situation géopolitique catastrophique du Moyen-Orient on fait oublier que l’actuel Irak (du moins ce qu’il en reste) a été le théâtre de combats durant la Grande Guerre. Il s’agissait alors de la confrontation entre l’Empire ottoman agonisant et l’Empire britannique alors à son zénith. Déclenchée par les Britanniques dès la fin 1914, la campagne de Mésopotamie a connu des phases calmes et des phases de combats plus intenses. Mais contrairement au front de l’Ouest, elle n’a pas été marquée par une guerre de position mais bel et bien par un combat de manœuvres, certes tempérés par les conditions climatiques et physiques de la région. Concomitante à la guérilla de Lawrence d’Arabie dans le Hedjaz et tard à la campagne d’Allenby en Palestine, la campagne de Mésopotamie va contribuer – en dépit de l’échec retentissant de Kut el-Amara – à l’éclatement de l’Empire Ottoman et au redécoupage des frontières régionales.

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1 – LES ENJEUX STRATÉGIQUES

– En 1914, la Mésopotamie est encore l’une importantes régions de l’Empire ottoman. Bien qu’éloigné de Constantinople par 2 400 km, Bagdad reste un important centre économique et culturel. En outre, la Mésopotamie est privilégiée d’un point de vue hydrique grâce au Tigre et à l’Euphrate qui lui permettent de disposer de terres fertiles. En outre, les deux fleuves connectent plusieurs villes de l’intérieur de l’Empire avec le Golfe Persique. La population de cette partie de l’Empire est à majorité arabe. Mais Continuer à lire … « La campagne britannique de Mésopotamie (1) »

Zivojin Misic

– Dernier enfant d’une fratrie de treize enfants, Zivojin Misic voit le jour le 19 juillet 1855 à Struganik dans le centre-ouest de la Serbie. Il est le dernier des dix garçons de Radovan Misic et Andelija née Damjanovic-Kostunjic, bergers et paysans.
A l’âge de six ans, il rejoint ses parents près des moutons mais peut tout de même exercer sa scolarité à Kragujevac. Dans ses Mémoires, il raconte avoir eu maille à partir avec les garçons de son école en raison de ses humbles origines.
Zivojin Misic entre ensuite au Lycée de Kragujevac. S’il ne brille guère durant cinq ans, il termine sa scolarité à Belgrade avec succès.
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– En 1874, il est admis à l’Académie Militaire royale de Serbie de laquelle il sort au dix-neuvième rang. Durant ses vacances, il retourne à Struganik pour aider ses parents et ses frères aux champs. En 1876-1878, versé dans l’Infanterie, il trouve l’occasion de se distinguer lors de la Guerre serbo-turque et obtient le grade de Lieutenant. En 1884, il épouse une jeune fille allemande, Louise Krikner. Le mariage a lieu dans l’Eglise de l’Ascension de Belgrade. Trois garçons (Radovan, Aleksandar et Vojislav) et trois filles (Eleonora, Olga et Andelija) naîtront de cette union. En 1885, le Lieutenant Misic commande une compagnie au sein du 5e Régiment de la Division « Drinska ». Mais la guerre s’achève par une défaite pour le Royaume de Serbie, après la défaite de Slivnitsa (19-28 novembre). L’Armée bulgare était alors bien mieux commandée.

– En 1903, le Roi Alexandre Ier Obrenovic est renversé par l’Armée par un coup d’état organisé par « La Main Noire », sous la conduite du Colonel Dragutin Dmitrijevic. L’issue du coup de force est particulièrement sanglant, puisque A Continuer à lire … « Zivojin Misic »

18 janvier 1916 : Evacuation des Serbes à Corfou

– Pendant près d’un an, après la lourde défaite infligée à Vienne sur la Kolubara, le front austro-serbe est resté calme. A Paris, le GQG presse les officiers serbes en liaison à Paris d’inciter le Régent Alexandre Karagjeorgjevic à lancer des offensives sur la Save. Au moins, pense-t-ton, cela incitera les puissances centrales à mobiliser des forces dans les Balkans. Mais au comme le rapporte le Général Edmond Buat dans son Journal, au grand désarroi de la Direction des Théâtres d’opérations extérieures, les Serbes n’attaquent pas. Ils préfèrent garder leurs maigres forces en place car craignent – à raison – que les Empires centraux tentent une nouvelle invasion.
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– Plus grave encore, en dépit des démarches de diplomates Britanniques et Français, la Bulgarie du Roi Ferdinand Ier s’est rangée du côté des Empires centraux. Cet autre royaume n’a toujours pas digéré le retournement de Belgrade en 1912 à la fin des Guerres balkaniques et veut lorgne sur plusieurs pans du territoire serbe. Vienne, Berlin et Sofia mettent alors au point un plan d’invasion de la Serbie destiné à anéantir définitivement la résistance du petit royaume. Belgrade espère une intervention de la Grèce avec laquelle elle est liée par un traité d’alliance (1912) mais le Gouvernement d’Athènes ne bouge pas, tiraillé entre les pro-Entente et les partisans des puissances centrales. Avec le ralliement des Bulgares, Berlin et Vienne disposent de 300 000 hommes contre 200 000 Serbes. Pire encore, ceux-ci ont connu une première épidémie de typhus dans leurs rangs et manquent cruellement de munitions comme d’armes lourdes.

– L’offensive contre Belgrade est confiée au vieux mais compétent Continuer à lire … « 18 janvier 1916 : Evacuation des Serbes à Corfou »

Le plan d’attaque allemand de Verdun

1 – VERDUN, UN SECTEUR PEU PROPICE POUR UNE PERCÉE ?

– Permettons-nous d’abord un bond en arrière dans le temps. Verdun a toujours eu une place particulière dans l’histoire des frontières de la France, du fait de son positionnement sur la Meuse. Autant même dire qu’elle a eu presque la vocation d’être une place forte. Camp romain pendant la Haute Antiquité (Virdunum), puis Castrum dès le IIIe siècle, c’est sous ses murs qu’en 843 les trois fils de Louis le Pieux et petits-fils de Charlemagne signent l’agonie de l’Empire carolingien. Ville et Évêché de Lotharingie située non loin du royaume rival de Francie occidentale, puis terre de l’Empire germanique elle connaît une série de travaux de fortifications. Au XVIe , elle connaît les terribles affrontements entre Habsbourg et derniers Valois avant de passer définitivement dans le giron français sous Louis XIII, ce qui la place en surveillance du Duché de Lorraine, terre fidèle à Vienne. Sous Louis XIV, elle devient une ville de garnison et sous ses successeurs. Elle conserve ce statut durant l’Empire et les régimes successifs. Après la guerre de 1870, Verdun se retrouve à proximité des frontières du IInd Reich. devient un secteur fortifié intégré dans le système défensif du Général Seré de Rivières. Dès 1873 et jusqu’en 1913, plusieurs régiments y stationnent et d’importants travaux de fortifications sont entrepris, surtout sur la rive droite de la Meuse au nord et à l’est de la ville. Son système défensif, que nous détaillerons plus tard, se compose de forts et de différents ouvrages.

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Wilhelm Kronprinz von Preussen. Le fils de Guillaume II commande la 5. Armee

– En revanche, quand on se penche sur une carte, on constate curieusement Verdun n’est pas l’objectif stratégique offrant les plus grandes opportunités pour une percée. Certes, permettait-elle de passer l’obstacle naturel que représente la Meuse mais elle n’est ni un nœud routier, ni un nœud ferroviaire de grande importance. La seule voie ferrée (« Le Meusien ») qui y passe relie Sainte-Menehould vers l’ouest. En somme, rien qui Continuer à lire … « Le plan d’attaque allemand de Verdun »

Pourquoi attaquer Verdun en 1916 ?

– Mythique, titanesque, sanglante. Victoire du courage des « Poilus » pour certains, symbole de l’absurdité de la guerre pour d’autres. Tels sont les adjectifs et caractéristiques longtemps attribués à la bataille de Verdun, devenue le symbole sacrificiel de toute une génération de jeunes français. Nombre d’auteurs et de témoins ont laissé une impressionnante quantité de récits littéraires et épistolaires qui décrivent la bataille à hauteur de tranchée. La bataille de Verdun est également personnifiée par le courage et l’abnégation dont ont fait preuve des centaines de milliers d’anonymes. Mais elle est aussi personnifiée par des figures qui deviendront des références après la Grande Guerre. Citons le Colonel Driant avec ses Chasseurs à Pied, le Commandant Raynal au Fort de Vaux, ainsi que Philippe Pétain, toujours considéré comme l’artisan de la victoire défensive. Dans la mémoire nationale française, on a conservé l’image de la ténacité et de l’abnégation de centaines de milliers de « poilus » face à l’Armée du Kaiser, alors que les généraux de Berlin souhaitaient « saigner à blanc l’Armée française » par un « Grand Jugement ».

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Erich von Falkenhayn

– Cependant, l’interprétation de l’idée de « saigner à blanc » l’Armée française est souvent mal interprétée. Non, Erich von Falkenhayn ne souhaitait pas l’anéantissement complet de l’Armée française dans une gigantesque bataille d’attrition. Et encore non, il ne voulait pas effectuer une percée qui lui aurait ouvert les portes de l’Est de la France. Grâce aux travaux des historiens anglo-saxons, notamment Robert Foley, nous savons maintenant que l’objectif du Grand-Etat-major allemand visait ni plus ni moins à épuiser la France moralement pour lui faire perdre toute volonté politique à poursuivre la guerre et donc, la contraindre à ouvrir des négociations qui permettraient à l’Allemagne de sortir du conflit par le haut.
Ainsi, comme nous le verrons plus loin, le plan de bataille élaboré par Continuer à lire … « Pourquoi attaquer Verdun en 1916 ? »

Il y a cent ans les alliés évacuaient Gallipoli

– A la fin de l’année 1915, la situation des Britanniques, Français, Australiens et Néo-Zélandais – déjà bloquée – empire en raison des conditions climatiques. En effet, à l’été chaud et sec succède une période de fortes pluies (octobre – décembre) qui ne tardent pas à transformer les lignes alliées et turques en véritable bourbier. Les quelques 100 000 hommes du Corps expéditionnaire allié se retrouvent donc à patauger dans leurs tranchées et les unités médicales – qui avaient déjà fort à faire – se retrouvent vite débordées en raison de l’afflux de nouveaux malades.

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– Devant cette situation, les hauts-responsables civils et militaires britanniques hésitent sur la stratégie à suivre concernant les Détroits. Nombre de voix plaident pour une évacuation, alors que d’autres comme celle de Lord Curzon (ancien Vice-Roi des Indes) refusent cette éventualité.
Dès le 11 octobre, plusieurs voix au sein du War Cabinet plaident pour une évacuation. Horatio Kitchener demande alors à Ian Hamilton de dresser les premiers plans d’un rembarquement. Mais le commandant du MEF refuse, arguant qu’un Continuer à lire … « Il y a cent ans les alliés évacuaient Gallipoli »

Civils, militaires, qui dirige pendant la Grande Guerre ?

Emission de Jean Lebrun diffusée sur France Inter, avec l’intervention de Nicolas Rousselier, Maître de Conférence à Sciences-Po qui explique clairement les relations entre l’Etat-Major français, le Gouvernement et le Parlement.

http://www.franceinter.fr/emission-la-marche-de-lhistoire-civils-militaires-qui-dirige-pendant-la-grande-guerre