22-24 mai 1916 : échec de Mangin à Douaumont

– Effectuons tout d’abord un court rappel : le Fort de Douaumont est tombé aux mains des Allemands mais ceux-ci n’ont pas percé le dispositif français. Les 7-8 mars, après avoir fait reposer ses forces et remodelé son dispositif d’attaque, le Kronprinz expédie le V. Reserve-Korps d’Erich von Gündell (9. et 10. Divisionen) à l’attaque des secteur de Thiaumont et Froideterre dans l’espoir de percer sur Vaux. Mais c’est un échec. Courant avril, le Kronprinz relance un nouvel assaut entre la Ferme de Thiaumont de l’étang de Vaux dans l’espoir de faire tomber ces verrous ennemis et de déboucher vers Souville. Mais en dépit de leurs pertes, les Français tiennent bon une fois de plus. Ensuite, comme nous l’avons vu, l’effort allemand se concentre derrière la rive droite de la Meuse, contre le Mort-Homme et la Cote 304.

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1 – NIVELLE REMPLACE PETAIN

– Du côté Français, Pétain mise encore sur la défense, avec succès. Sauf que son attitude n’est pas du goût de certains cercles parlementaires qui gravitent autour du GQG de Chantilly, de la Présidence du Conseil et du Ministère de la Guerre. Or, courant avril, Pétain ne tente aucune offensive sur le front de Verdun, craignant de faire subir d’inutiles pertes à sa IIe Armée face à un ennemi encore solide. Sauf que nombre de Parlementaires et généraux souhaitent le retour des offensives. Or, le Général Joffre planche toujours sur son projet d’offensive sur la Somme, préparée conjointement avec les Britanniques. Soutenu par Pierre Roques Ministre de la Guerre (et son camarade de promotion à l’X) et par nombre de Députés et Sénateurs, Joffre souhaite que Pétain reprenne l’offensive dans le secteur de Verdun. Ce à quoi l’intéressé rechigne. En outre, Joffre est de plus en plus excédé par les réclamations de Pétain quant à ses demandes de moyens matériels et humains qui amputent le dispositif de Foch pour la prochaine offensive sur la Somme. Les Ministres et Parlementaires avancent alors leur champion : Robert Nivelle, intellectuellement l’inverse de Pétain. Polytechnicien et artilleur de formation, Nivelle se montre toujours ardent partisan de l’offensive. Il s’est néanmoins distingué en 1914 en malmenant sérieusement le IV. Korps allemand, avant de prendre le commandant du IIIe Corps d’Armée. Nivelle est aussi un ambitieux, fidèle à Joffre mais docile quant aux ordres donnés. Mais Joffre ne peut pas écarter Pétain qui est devenu très populaire aux yeux des Français en l’espace de trois mois. Du coup, le 19 avril, il décide de l’écarter du front de Verdun en le nommant commandant du Groupe d’Armées du Centre (GAC) en remplacement de Ferdinand de Langle de Cary. Comme le dit Bénédicte Vergez-Chaignon, Philippe Pétain vit très mal cet éloignement forcé et en acquiert une sérieuse rancœur mais principalement envers le Gouvernement.

– Nivelle arrive à Verdun le 28 avril, après s’être vu confié le commandement de la IInde Armée par Pétain. Conformément aux ordres reçus de Chantilly, Nivelle décide de lancer une contre-attaque contre le dispositif allemand. Sa cible est à la fois tactique et politique : le Fort de Douaumont.

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2 – CARNAGE A DOUAUMONT

– Nivelle confie l’assaut contre le Fort à la 5e Division d’Infanterie commandée par le Général Charles Mangin. Nivelle sait que Mangin, réputé fonceur, ne discutera pas ses ordres. L’attaque est prévue pour le 17 mai. La 5e Division a déjà participé aux combats dans la défense de la Ferme de Thiaumont durant le mois d’avril avant de connaître une période de repos à Stainville. Elle regroupe les 9e et 10e Brigades, amalgament les 74e, 274e, 36e et 129e RI.

– Mais le Fort de Douaumont a été considérablement renforcé par les Allemands. Début mai, il abrite l’Infanterie-Regiment Nr. 52 et le Grenadier-Regiment Nr. 12, avec dépôts d’armes et munitions, ainsi que des postes de secours. Les nouveaux occupants ont pris soin de faire entourer les restes défoncés de l’édifice par un réseau étoffé de fils barbelés et y ont installé des mitrailleuses, afin de parer aux assauts français. Mais le 8 mai survient un incident dramatique. En effet, une erreur humaine provoque l’explosion des dépôts de lance-flammes et de grenades. Résultat, entre 800 et 900 hommes sont tués et de nombreux blessés. Immédiatement, le Kronprinz fait renforcer le secteur par le I. Königlich-Bayerisches-Korps d’Oskar Ritter von Xylander (Ier Corps royal de Bavière), comptant les 1. et 2. Königlich-Bayersiches-Divisionen, avec artillerie et mitrailleuses.

– Le plan de Nivelle et Mangin n’est ni plus ni moins qu’un assaut frontal contre la partie ouest du Fort de Douaumont, lancé depuis la Ferme de Thiaumont après un barrage préparatoire d’artillerie.
Le 17 mai, les bouches à feu françaises martèlent le Fort de Douaumont dans lequel les Bavarois et rescapés de l’explosion du 8 se sont terrés. Les obus s’abattent durant plusieurs jours, ce qui vient confirmer les soupçons des Allemands estimant que les Français tenteront de reprendre l’ouvrage. Le 22 mai, les fantassins de la 5e Division d’Infanterie s’élancent à l’assaut pour se faire impitoyablement accueillir par les mitrailleuses Maxim. Après deux jours durant lesquels Mangin n’épargne pas l’effort de ses quatre régiments et au prix de centaines de tués et blessés, les Français parviennent à atteindre la portion ouest du Fort. On se bat alors à la grenade pour des parcelles de terre et de béton. Mais la défense allemand a raison du courage et du sang français. Le 24 mai, Nivelle arrête les frais et autorise Mangin à cesser son attaque.
Pour à peine trois jours d’engagement, les pertes de la 5e DI sont effroyables : 5 000 tués, 500 prisonniers et de nombreux blessés pour un résultat quasi-nul.

 

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