Hormis la saga « Mad Max », le Cinéma australien est assez méconnu en France, occulté par la machine hollywoodienne. Pourtant, les productions du Dominion ont laissé quelques petits joyaux parmi les films de Guerre.
– Ainsi, durant la période de la « Nouvelle vague australienne », plusieurs réalisateurs se firent un nom dans les films de Guerre, avec le choix de retracer des épisodes de l’histoire récente australienne. Ces productions s’inscrivent également dans un processus de construction d’une histoire « nationale » australienne, dont le but est d’affirmer une identité propre au Dominion, en distinction de la Grande-Bretagne. Ce processus n’était alors pas nouveau, puisqu’il avait justement démarré dès 1915.
– En 1980, Bruce Beresford s’attaque à la Guerres des Boers dans « Breaker Morant » dans lequel le réalisateur questionne les crimes de guerres commis envers les Afrikaneers. La Grande Guerre tenant une place importante dans la mémoire de l’Australie, il était naturel que plusieurs réalisateurs s’y attaquent également. Ainsi, en 1981, Peter Weir (qui réalisera plus tard « Witness », « Le cercle des poètes disparus », « The Truman Show », « Master and Commander » et « Les chemins de la Liberté ») sort « Gallipoli », avec Mark Lee et Mel Gibson dans le rôle-titre. Le film pointe l’entêtement et l’incompétence du commandement. En 2015 – à l’occasion du centenaire de la bataille en question –, Russell Crowe reprendra le thème de Gallipoli avec « La promesse d’une vie », en axant la narration sur les liens familiaux.
– S’inscrivant dans cette dynamique initiée par Beresford, Simon Wincer (dont la carrière sera bien moins étoffée que celle de P. Weir) réalise « La chevauchée de feu », dont le titre original, « The Lighthorsemen », est plus évocateur. Contrairement à Weir qui évoquait la jeunesse sacrifiée et l’innocence perdue, Simon Wincer réalise clairement un film-hommage aux anciens combattants australiens. D’autant que nombre d’entre eux étaient encore envie à la sortie du film. Celle-ci a opportunément lieu en 1987, pour le soixante-dixième anniversaire de la bataille de Beershebba – Gaza (31 octobre 1917). Ian Jones (le scénariste), qui avait visité le lieu même de la bataille en 1979, souhaitant ardemment écrire une histoire sur ce thème. Le procédé de narration du film est simple : Jones et Wincer intègrent des personnages fictifs dans un événement militaire victorieux et les font croiser des personnages réels (Edmund Allenby, Henry Chauvel, Richard Meinertzhagen et Murray Bourchier).
– Le film suit le parcours de quatre jeunes recrues de la Cavalerie Légère australienne (le Light Horse Regiment), Scotty, Tas, Frank et Dave, de leur engagement jusqu’à leur arrivée dans le secteur de Gaza. Les quatre camarades sont alors engagés dans l’une des dernières charges de la Cavalerie australienne, celle qui ouvrira la porte de la Palestine et la route de Jérusalem aux troupes du Commonwealth. La romance du film n’est pas très utile mais la seconde partie suit très bien le déroulé de la bataille de Beershebba. La ruse de Richard Meinertzhagen – cruciale pour le succès – n’est pas omise. Le film vaut surtout pour la superbe séquence de charge contre les positions turques, avec un très beau cadrage. C’est en grande partie grâce à cette séquence que « La chevauchée de feu » reçut de très bonnes critiques.
– Passé inaperçu en France à sa sortie, il a cependant été diffusé en VHS à la fin des années 1980. D’un point de vue historique, le film mérite un visionnage, ne serait-ce que pour avoir un aperçu des campagnes du Moyen-Orient, avec ses fronts mouvants et l’utilisation des unités mobiles, nécessaires dans un terrain dégagé. Et hormis quelques erreurs, notamment sur les drapeaux, la reconstitution historique est excellente, notamment pour les uniformes, armes et équipements.
Jean-Philippe Renault