Avions en mer ; quand la Grande-Guerre invente l’aéronavale – Partie 1

– Quand on pense au mot « aéronavale », nous viennent très vite en tête les images des grands affrontements de la Guerre du Pacifique entre Américains et Japonais. Mais comme pour beaucoup d’aspects de la Seconde Guerre mondiale, l’aéronavale a bien eu ses précédents et ses pionniers durant la Grande Guerre et même avant. En effet, c’est à la fin de la Belle Epoque que l’on découvre le potentiel des avions dans une potentielle future guerre navale. L’élément naval, qui était jusque-là l’apanage des cuirassés et autres dreadnoughts, se retrouve « relié » à l’élément aérien. L’emploi des appareils en mer reste en effet bien moins « médiatisé » que les affrontements au-dessus du front de l’Ouest, car peu spectaculaire en comparaison des exploits des « as ». Mais il s’intègre dans un processus de réponses à de nouvelles menaces (sous-marins, Zeppelin) qui engendre de nouvelles techniques d’emplois, qui elles-mêmes donnent naissance à de nouveaux types d’avions et de vaisseaux.

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Décollage d’un Sopwith « Pup » sur ne plateforme installée sur le croiseur australien « Sydney »

1 – QUAND L’AVION CONTESTE LE RÈGNE DES GRANDS CUIRASSES  

– Au début du XXe siècle, une bonne partie des officiers considère que les cuirassés et autres dreadnoughts sont les « armes absolues » sur mer. Et on estime alors  que l’aviation n’est rien d’autre que du sport pour officiers oisifs. Pourtant, les innovations techniques propres à la fin de la Belle Epoque font des émules chez les jeunes officiers et certains responsables militaires. Et l’aéronautique navale en fait partie. Winston Churchill pour la Grande-Bretagne, le Rear-Admiral Bradley A. Fiske pour l’US Navy, René Daveluy et Paul Teste pour la France, ainsi qu’Alessandro Guidoni et Mario Caldarera pour l’Italie sont les promoteurs de ce nouvel emploi des biplans (1). Du côté des « conservateurs », sévères gardiens du dogme de l’emploi du cuirassé, on s’agace de voir les dossiers « novateurs » s’accumuler sur les étagères des différents bureaux des états-majors navals d’Europe.
Seulement, l’évolution de l’aviation va donner raison aux thuriféraires de l’aéronautique. Si en 1908 l’Amirauté britannique a raison d’estimer que l’emploi de l’avion est sans avenir au sein, tout est remis en cause lors de la traversée de la Manche par Louis Blériot l’année suivante. En 1901, Henri Fabre donne naissance à l’hydravion, tandis qu’Eugene Ely réalise successivement un décollage depuis la rampe d’un navire, puis le premier atterrissage à bord. Du coup, les « sportifs » bousculent les tenants des cuirassés.

– Toutefois, l’avion doit attendre encore un peu car ce sont les dirigeables qui ont la cote, tant au sein de l’Entente que dans la  jeune Kaiserliche-Marine qui se dote de Zeppelin. Sauf que suite aux accidents successifs de ses ballons, l’Amirauté britannique penche pour l’avion et crée en 1912, un service aéronautique pour la Royal Navy, le Naval Wing.Le Royal Naval Air Service (RNAS) est créé par la suite mais reste une dépendant du Royal Flying Corps, bien que certains plaident pour son rattachement au RFC. Quand Winston Churchill assure la fonction de Premier Lord de l’Amirauté, le RNAS devient sa marotte, même s’il se déclare partisan d’un corps aérien unifié. Avec sa passion pour les nouveautés Churchill encourage les recherches et les innovations, comme l’avion à torpille. Il a même assuré avoir inventé le mot « hydravion » (seaplane) pour remplacer le trop lourd « hydroaéroplane ». Churchill finit par confier l’administration du RNAS au Commodore Murray Sueter qui devient également le directeur du Département de l’Armement de l’Amirauté (novembre 1912). Sueter a été membre de l’Advisory Committee for Aeronautics en 1909, puis délégué à la Conférence internationale de la Navigation aérienne de Paris (1910). En France, en 1910, la Commission parlementaire Le Pord examine le « bien-fondé de l’utilité des aéronefs » pour vite recommander d’intensifier les efforts sur l’aviation. Dans la foulée, suivant l’exemple britannique, la Royale crée son Aviation Maritime, alors que la Marine allemande achète ses premiers appareils. Enfin, Italiens – qui ont le contrôle de l’Adriatique comme préoccupation – forment l’Aeronautica della Regia Marine, tandis que l’US Navy construit sa première base aéronavale à Pensacola (2). La Russie commence également à expérimenter également l’emploi d’avions dans la Baltique et en Mer Noire mais à un stade qui restera en deçà des travaux des autres belligérants jusqu’en 1917.

– Ainsi, au déclenchement de la Guerre, l’aéronavale est certes en expérimentation et en développement mais elle n’est nullement une lubie de quelques esprits avant-gardistes. Chaque belligérant possède même déjà plusieurs dizaines d’appareils destinés à des opérations navales. Pour preuve, plusieurs bases sont créées : Eastchurch dans le Kent, Helgoland, Saint-Raphaël, Venise et Pola (en actuelle Croatie). Les bases navales situées « à terre » sont alors nécessaires, car l’autonomie des appareils ne leur permettent pas de voler au-dessus de la mer pendant de longues heures. Du côté français, l’un des plus grands ingénieurs français, Clément Ader théorise l’idée de convertir des navires en « porte-avions », dans « L’Aviation militaire » (1909). Or, les avions embarqués sur ce nouveau type de navires doivent avoir des ailes rabattables, et seraient équipés de roues. Ader, prudent, recommandait que le fuselage derrière le poste de pilotage restât ouvert, de sorte que l’aviateur pût faire une sortie rapide « en cas de chute dans l’eau » (3). Pour l’heure, les Français, les Allemands et les Austro-Hongrois privilégient l’usage d’avions à flotteurs, alors que les Britanniques s’efforcent d’embarquer des avions sur la structures des navires.  Mais comme l’explique R.D. Layman, les Alliés de l’entente doivent faire face à des problèmes sur les flotteurs. Ainsi, au Lac Scutari au Monténégro, les Français découvrent que les flotteurs se détériorent au contact avec la salinité. D’autres se trouvent endommagés à cause de la fraîcheur de l’eau. Chez les Britanniques, certains appareils supportent mal le climat chaud et aride de la Mer Rouge, comme le climat tropical de l’Afrique de l’Est (Kenya) : surchauffe des moteurs, colle qui fond,  détérioration de la structure en bois, pourrissage du tissu… Du coup, toute la conception des premiers hydravions est à revoir (4). En 1915, les Français alignent de nouveaux hydravions bimoteurs qu’ils fournissent aux Britanniques. Mais le sable et l’air chaud du Proche-Orient nécessitent un entretien des moteurs toutes les vingt heures. Par conséquent, le Royal Navy Air Service No 2 Wing qui opère en Mer Egée finit par les abandonner (5).

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Murray F. Sueter

– Mais il n’en reste pas moins qu’à l’instar des opérations terrestres, l’aviation navale devient donc un élément de la puissance navale engagé afin de poursuivre les objectifs maritimes. Mais l’approche et les doctrines diffèrent d’emploi diffèrent si les appareils sont utilisés dans des opérations terrestres ou navales. L’élément marin implique de prendre en compte des difficultés comme les vents océaniques et le temps changeant soudainement. Enfin, en mer un pilote possède moins de chance de survie que sur terre, s’il tombe en panne. D’autre part, il faut régler le problème des communications qui doivent pourtant être fiables et rapides. Elles s’effectuent d’abord par l’utilisation de lampes, de fusées et de boîtes contenant des messages. De plus, un observateur en reconnaissance soit être sûr des coordonnées de l’objectif à transmettre par moyen lumineux. Le problème sera définitivement réglé avec les transmissions sans fil. Les premiers essais ayant lieu pendant les opérations de Gallipoli mais encore sans grands succès. Mais la radio ne peut encore palier aux erreurs de navigation des pilotes. En concernant certaines cibles, notamment des sous-marins, de mauvaises évaluations pourront engendrer des tirs fratricides, notamment chez les Britanniques (6).

– Sur terre comme en mer, l’avion devient vite les yeux des artilleurs, d’autant qu’ils peuvent « voir » loin. Sauf qu’en l’absence de grandes batailles navales (excepté le Jutland mais qui ne sera pas un cas d’école sur ce point), la coopération entre artilleurs navals et aviateurs ne sera pas aussi perfectionnée qu’à terre.  A Gallipoli, cette coopération est même source de discordes chez les Anglais, lors du – peu efficace – bombardement des Forts Turcs (7). L’aide des aviateurs n’est pas toujours bien accueilli par les canonniers de la Royal Navy. L’Amiral Davies rappelle qu’à Gallipoli « les vaisseaux reçoivent sans véritable empressement les rapports aériens sur le point de chute du tir ». Une autre source indique que « la Navy en Mer Egée refuse régulièrement de prendre en compte les observations faites par avions » (8). Artilleurs et aviateurs allemands se montrent plus efficaces dans les Flandres, avec des pièces de 280-300 mm (30 km de portée) quand il s’agit d’empêcher la Royal Navy d’approcher les installations d’U-Boote.  A cette tâche, les observateurs aériens allemands se montrent particulièrement efficaces. En revanche, en 1914, un groupe d’observateurs aériens hâtivement formé, permet à deux navires de type Monitors de réduire le croiseur « Königsberg » à l’état d’épave au l’embouchure de la rivière Rafiji en Afrique de l’Ouest (9). Mais il y a aussi l’étrange cas du navire pirate « Wolf », qui fait une croisière tranquille dans la deuxième moitié de la guerre. Ce bateau transporte un seul hydravion Friedrichshafen surnommé « Wölfchen » qui « repère » pour lui de manière insolite. L’hydravion décolle et scrute l’horizon et quand il situe un navire marchand allié, il effectue des tours menaçant et lâche une ou deux bombes. Ensuite, il envoie un message ordonnant à l’équipage du navire de se diriger vers le navire allemand sans utiliser sa TSF (10).

– Le potentiel offensif des avions fait dire aux Alliés qu’ils peuvent être employés pour des attaques dans la profondeur du dispositif ennemi. Si selon R.D. Layman, ce sont les Français qui ont initié le mouvement avant les italiens, les Britanniques poussent les recherches assez loin. Or, le développement des bombardiers stratégiques fait l’objet d’une querelle entre l’Amirauté et le War Office sur la politique de bombardement. Le War Office estimant que le bombardement stratégique reste un moyen d’appuyer les troupes terrestres par des attaques de diversion. De 1914 à 1915, Churchill et Sueter gardent leur prédominance sur le développement des bombardiers. Mais en mai 1915, Churchill démissionne de l’Amirauté suite à l’échec de Gallipoli. Son remplaçant, Sir Arthur Balfour se montre bien moins résolu quant à la poursuite de ce travail  et Sueter se voit relégué comme Superintendant du Département de la construction aérienne (11).
C’est une décision du Joint Air War Committee, formé en février 1916, qui permet de sortir de l’impasse. L’organe, qui a pour charge de régler la question des fournitures et de la conception du matériel pour le RNAS, axe ses  recherches sur à la destruction des infrastructures de constructions navales allemandes (quais et arsenaux). En mai 1916, l’Amirauté crée la No. 3 Wing RNAS après avoir reçu l’approbation et l’assurance de la coopération française. Sauf que l’unité n’aura pas l’occasion de briller contre des bases navales allemandes. « Vampirisée » par Hugh Trenchard (commandant du Royal Flying Corps), l’unité n’effectuera qu’’un seul raid… en Alsace, contre une usine de fusils Mauser. Et sans grand succès. Le No. 3 Wing RNAS est finalement dissous fin 1916. En outre, le Fieldmarschall Douglas Haig s’est montré particulièrement sceptique quant à la capacité de ses unités à nuire au potentiel militaire allemand (12).

– Toujours dans l’optique de bombardements à grande échelle, en 1918 le pionnier de l’aéronavale américaine Hency C. Mustin propose ni plus ni moins que 5 600 petits porte-avions, chacun formé d’une plateforme portée par un flotteur à air, embarquent chacun un avion (13). Mustin souhaite que les Alliés lancent une attaque massive contre les ports allemands. Mais ce scénario, digne des romans de Danrit (14), fait davantage figure de science-fiction et n’est pas pris au sérieux.

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2 – RAMPES ET PLATEFORMES : VERS LA NAISSANCE DU PORTE-AVIONS

– Embarquer un avion ou un hydravion sur un navire n’est pas un problème en soi. Toutes les marines de la Première Guerre mondiale – Japon compris – disposent de grues ou de treuils pour « monter » les appareils sur la structure des vaisseaux de guerre. Mais c’est le décollage et surtout l’atterrissage qui se révèlent problématiques. Et les accidents ne sont pas rares. D’abord expérimentale, la solution de plateformes ou de rampes montées sur la structure du navire – souvent sur les tourelles – est retenue. Parfois, il arrive que les hydravions (à flotteurs) décollent grâce à un chariot à roulettes (15). On trouve aussi des projets plus fantaisistes, comme des ponts d’atterrissage montant vers le haut pour ralentir la course de l’appareil ou d’autres ressemblant à des pistes de ski. Mais aucun n’est retenu. Les Français testent également une technique qui consiste à hisser un avion sur une bôme élevée se détachant du flanc du bateau. A un signal donné, le pilote lance son moteur à plein régime – et l’avion est largué. Suivant une idée de Sir John Fisher, le croiseur léger HMS « Furious » est équipé de rampes permettant aux avions de décoller. Sauf que rien n’est prévu pour leur permettre « d’atterrir », faute de moyens techniques. Mais deux « appontages » sont accomplis avec un avion glissant sur le côté de la plateforme. Mais la troisième tentative provoque la mort du pilote. Pour régler ce problème, la solution, pense-t-on, est de fixer une structure centrale pour les appontages mais cela s’avère impossible (16).

– Ce sont les Britanniques qui alignent les premiers porte-avions expérimentaux avant Bataille du Jutland. ». Le processus résulte en fait de la lutte contre les Zeppelin durant laquelle la Royal Navy essaie de faire décoller sans grande réussite des avions depuis des plateformes installées sur de petits navires. Trois transporteurs de voyageurs sont « reconvertis » du fait de leur vitesse comprise entre 18 et 21 nœuds. Il s’agit des « Engadine », « Riviera » et « Empress ». Suivront les « Campania », « Vindex » et « Manxman ». Les « Pegasus » et « Nairana » voient leur construction engagée mais sont convertis en vaisseaux marchands durant la Guerre. Mais sur suggestion de Lord Jellicoe, le « Campania » prend la forme qui annonce les futurs porte-avions contemporains, avec l’adjonction d’un hangar pour abriter les appareils, ainsi que d’une rampe de décollage. D’autre part, les Britanniques utilisent d’abord des Fairey, des Short 184, des Sopwith Schneider, des Sopwith Camel, puis des Sopwith Babys. Mais après une étude commandée par le Grand Fleet Committee of Air Requirement, ils décident d’installer d’opter pour des Sopwith Pup. Bien que démodés pour le combat aérien sur le continent, ils peuvent tout à fait être embarqués sur des vaisseaux dotés de plateformes spéciales (17).

Lors de la Bataille du Jutland, John Jellicoe en compte 2 dans sa flotte : le HMS « Engadine » et le HMS « Campania ».  Le « Campania » n’est pas déployé en raison d’une erreur dans la transmission d’ordre. En revanche, incorporé au 3rd Light Cruiser Squadron (3e Escadre de croiseurs légers) de la Battlecruisers Fleet de David Beatty, l’ « Engadine » embarque 2 Short 184 pour la reconnaissance et 2 Sopwith Babies pour la chasse anti-dirigeables. Sauf que les Britanniques connaissent de sérieuses difficultés pour bien employer leurs avions embarqués. L’« Engadine » a effectivement besoin de 30 minutes de préparation pour lancer les avions et il ne peut accomplir cette tâche que si la mer est calme. Or, en ces 31 mai – 1er juin 1916, intégré au sein d’une escadre, il subit forcément les roulis causés par la flottaison des autres vaisseaux de guerre. Après avoir reçu ordre et contrordre quant au cap à suivre (« coller » à la flotte de Beatty ou rester en arrière) l’ « Engadine » finit par rejoindre les unités navales entrées au contact de la Hochseeflotte et lâche un avion qui signale les bonnes positions de certains navires allemands. Or, le message rapporté aux équipes de transmission de l’ « Engadine » n’est pas correctement fournies à Beatty qui est mieux informé par le biais d’un croiseur. Finalement, le bateau est touché par un obus allemand et sombre. Les Britanniques tirent cependant plusieurs leçons de cet emploi hasardeux d’avions sur un navire. D’une part, le manque de transmission sans fil sur les avions rend inutile la reconnaissance aérienne en mer. D’autre part, la doctrine de la Grand Fleet voulant que les avions de reconnaissance soient utilisés de façon limitée s’en trouve critiquée. Sauf qu’il ne faut pas oublier, que de telles missions sont très risquées et peuvent s’avérer suicidaires, comme le note R.D. Layman. Or, les commandants d’escadre et les officiers du RNAS sont soucieux d’économiser le nombre de pilotes en mer (18).

– Suite à la bataille du  Jutland, l’Amirauté ordonne la construction d’un navire porte-avion mais sur la base d’un compromis. Le navire conservera une partie de sa structure originelle, tandis que l’autre, incomplète, sera dotée d’une sorte de plateforme. Cette fois, il ne s’agira pas de faire décoller des hydravions mais bien des avions comme ceux employés sur le continent. Certains officiers britanniques emploient même le terme « d’aéroport naval » (16). Le choix se porte sur un navire commandé par l’Italie, dont la construction est inachevée, le « Conte Rosso », bientôt rebaptisé HMS « Argus ». Mais la firme Beardmore planche d’abord sur deux structures parallèles  reliées entre elles au-dessus du pont d’envol. Mais les essais en soufflerie démontrent la folie d’une telle disposition. Finalement, le navire est redessiné avec l’installation d’un grand pont au-dessus de l’ensemble de la structure. Reste le problème du moteur. Au lieu d’être évacué à la verticale par des cheminées, les gaz du moteur sont évacués par de longs conduits disposés sur les flancs du navire. Néanmoins, Hugh Williamson propose à John Narbeth (Assistant Director of Naval Construction) la mise en place d’un « îlot » sur la superstructure, idée examinée par l’Airship, Aeroplane and Seeplane Sumbcomitee de l’Amirauté. De nouveaux essais viennent confirmer que l’installation de cet « îlot » n’affecte en rien l’atterrissage et le décollage des biplans. Mais le navire ne sera achevé qu’en 1918, trop tard pour être engagé. Les Britanniques en viennent aussi à lancer un second porte-avions en chantier, à partir d’un autre vaisseau inachevé pour le compte du Chili, l’« Amirante Cochrane » (19).

– En revanche, la transformation du croiseur HMS « Furious » en porte-avions marque la plus nette avancée. Long de 238 mètres, le navire offre un profil hybride, puisqu’il possède une plateforme à l’avant et une autre à l’arrière, toutes deux séparées par le bloc de cheminées. En 1918, les décollages sur son pont d’envol deviennent routiniers mais peuvent se révéler dangereux. Un pilote est tué lors d’un appontage. Mais en juillet 1918, le vaisseau est opérationnel, embarquant 7 Sopwith Camels qui ont reçu l’ordre de bombarder la base de Tondern. Cette mission, partie de Schleswig à l’aube du 19 juillet est un franc succès puisque les Zeppelin L54 et L60 sont détruits dans leurs abris. Le porte-avions a donc accompli sa première grande sortie qui en appellera d’autres.

– Les allemands suivent le mouvement, ce qu’on a oublié. Très vite, ils convertissent de navires civils, les « Answald » et « Santa Elena » en vaisseau porte-avions. Mais contrairement à leurs rivaux britanniques, ils sont lents (11 nœuds en moyenne), ce qui ne leur permet pas de coller aux vaisseaux de guerre. Du coup, ils serviront de « relais » marins aux avions. Du coup, l’état-major naval allemand préfère les envoyer dans la Baltique. Le « Santa Elena » participera notamment à une attaque contre la côte de Courlande, ainsi qu’à l’Opération « Albion », soit la prise des îles Moon, Ösel et Dago à l’entrée du Golfe de Riga, en couverture du succès offensif d’Oskar von Hutier (Octobre 1917). Toutefois, le commandement de la Hochseeflotte commande la conversion des croiseurs légers SMS « Stettin » et « Stuttgart ». Les navires sont armés en mai 1918 mais ne participeront qu’à une mission d’appui de mouillage de mines au large de Heligoland (20).

– Enfin, la flotte russe convertit elle aussi des navires (« Empereur Alexandre Ier » et « Empereur Alexandre II ») – d’abord construits par les britanniques – enthousiasmée par la stratégie d’agressive d’emploi des avions embarqués. Cela répond aux besoins de contrôler la Mer Noire face aux Ottomans et aux allemands. Vient ensuite l’« Almaz », un gros yacht prévu pour naviguer dans le Pacifique, ainsi que 5 navires marchands roumains. 4 d’entre eux seront employés de temps à autre mais le cinquième, le « Romania » sera constamment utilisé comme porte-hydravion. Ces vaisseaux employés peuvent embarquer 8 avions, pas davantage. Les Russes finissent par bombarder plusieurs ports turcs, ainsi que les dépôts de charbon. Outre les avions à flotteurs, ils utilisent des hydravions américains Curtiss, avant de les remplacer par des Grigorievitch. Chose rare, les équipages russes deviennent très vite qualifiés dans l’emploi de ces nouveaux types de navires. Un observateur notant même qu’ils peuvent faire atterrir 7 appareils sur un navire en 15 minutes. Une performance (21).

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HMS Furious

[Suite]

 


(1) KENNETT L. : « La première guerre aérienne 1914-1918 », Economica, 2006, Paris
(2) KENNETT L., Op.Cit.
(3) Ibid.
(4) LAYMAN R.D. : « The naval Aviation in First World War. Its impact and influence », Caxton Publishing, 2002, Londres
(5) LAYMAN R.D., Op. Cit.
(6) KENNETT L., Op.Cit.
(7) HART P. : « Gallipoli », Profile Book, 2011, Londres
(8) KENNETT L., Op. Cit.
(9) Ibid.
(10) Ibid.
(11) LAYMAN R.D., Op. Cit.
(12) Ibid.
(13) Ibid.
(14) On aura reconnu le Colonel Driant
(15) KENNETT L., Op. Cit.
(16) LAYMAN R.D., Op. Cit.
(17) Ibid.
(18) Ibid.
(19) Ibid.
(20) Ibid.
(21) Ibid.

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