Bataille de la Somme – Le Transloy et Le Sars

– A l’automne 1916, en dépit de ses pertes effroyables, le BEF a progressé en  matière tactique, ce qui lui a permis d’emporter plusieurs km de positions allemandes durant les offensives de septembre. Même si les offensives comportaient des lacunes, notamment dans la neutralisation des redoutes, il faut mettre au crédit des Britanniques une meilleure utilisation du barrage d’artillerie. En revanche, la rupture du front n’a pu être obtenue car si les premières offensives réussissaient, à J+1 et J+2, les Allemands reformaient des positions plus en arrière, provoquant l’enlisement des attaques de leurs ennemis. Autre progrès des Anglais, l’arrivée du Tank. Certes, les débuts ont été hasardeux sinon piteux mais ils ont très bien intégré la dimension « mécanique » de la guerre où l’infanterie n’a plus l’entier monopole du champ de bataille. Les ingénieurs britanniques ont relevé les améliorations nécessaires à apporter au Mark I : moteur plus puissant, blindage plus épais, développement d’un canon de 6-pounder et resserrement du roulement de chenilles. Enfin, des efforts sont entrepris sur l’utilisation de l’aviation et l’amélioration des communications.

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La boue, l’autre ennemie du Tommy

– Mais plusieurs points noirs demeurent, comme le font remarquer Robin Prior et Trevor Wilson. Ainsi, le commandement ne sait toujours pas à calculer le nombre exact de pièces d’artillerie nécessaires pour contribuer à la prise d’un objectif. Même si la méthode d’Ivor Maxse a réussi pour capturer Thiepval, le modus operati général semble consister rassembler le plus grand nombre de canons et d’obusiers et d’espérer en obtenir le meilleur résultat (1). Autre problème plus grave :l’incapacité de Haig à définir des objectifs précis à chaque offensive. Faut-il conquérir des objectifs précis ou bien saigner l’armée allemande le plus possible ? Espérant que son armée effectuera une percée – d’où ses ordres constants de rassembler des divisions de cavalerie (en prévision) – Haig ne place jamais l’attrition des troupes allemandes au centre de ses plans de bataille. Résultat, les Britanniques subissent plus de pertes que leurs défenseurs. De plus, à l’instar des offensives des 14 juillet et 25 septembre, les succès offensifs des premiers jours ont été suivies d’une perte de cohésion des forces et donc, à un enlisement.

– Autre facteur négatif qui affecte le déroulé des offensives britanniques : l’optimisme affiché de Haig et d’une bonne partie de ses officiers. A chaque début d’offensive, Douglas Haig est convaincu que le moral des Allemands s’est effondré.
D’autre part, il faut compter avec la météorologie. Haig a lancé ses offensives de septembre à la dernière période idéale pour l’année 1916. En effet, la seconde moitié de septembre a été marquée par du beau temps, excepté deux jours de pluies fines (18 et 29). Mais on ne peut espérer de telles conditions en octobre. Les fortes pluies d’octobre transforment le terrain en bourbier, empêchant les fantassins d’avancer rapidement et rendent également l’artillerie aveugle.
Un dernier danger concerne les Allemands. En octobre, la IVth Army a conquis de haute lutte trois lignes de défense allemande. Mais elle fait maintenant face à une quatrième ligne de défense qui passe par Le Transloy. Et les observations aériennes font état d’une cinquième en cours de constitution au sud de Bapaume. Et atteindre ces deux lignes implique aux Britanniques de couvrir 4 km, soit l’équivalent de la distance abattues en trois mois de combats. Bien entendu, le complexe défensif est particulièrement bien élaboré. En somme, s’emparer des deux dernières lignes implique le risque de prolonger les combats jusqu’au cœur de l’hiver (2).

– Toujours optimiste, en dépit des centaines de milliers de soldats tués et blessés, Douglas Haig choisit de prendre le risque. Il ordonne donc à Henry Rawlinson de s’emparer du Transloy et à Hubert Gough d’avancer sur le Bois de Loupart depuis le sud-est de Beaumont-Hamel. Pour couvrir cette offensive, Haig ordonne à Edmund Allenby d’engager le flanc gauche de la IIIrd Army contre le saillant de Gommecourt, qui, rappelons-le, fit l’objet d’un sanglant échec le 1er juillet. Mais très vite son plan s’avère particulièrement risqué et incohérent par les objectifs assignés à ses deux armées. En effet, au lieu de sécuriser définitivement les hauteurs de Thiepval et du Transloy. En effet, au lieu de s’assurer définitivement le contrôle d’une hauteur qui permettrait à l’artillerie britannique de régler ses tirs plus efficacement, Haig assigne à Rawlinson l’objectif de pénétrer dans une vallée, ce qui désavantagerait la IVth Army. Et c’est sans compter les pluies d’octobre qui risquent de transformer la vallée du Transloy en bourbier. En n’assignant aucun objectif précis à ses deux armées, Haig contribue à casser la cohésion de ses forces. Pour exemple, le 30 septembre, Haig convoque le Lieutenant-General Charles Kavanagh, commandant du Cavlary Corps et lui demande d’abord de sonder le secteur au nord de l’Ancre. Mais au fil de la discussion, il caresse fortement le projet de faire passer sa cavalerie pour prendre les troupes allemandes par surprise, « entre les marais à l’est d’Arras (autour de Hamel) et le Canal du Nord » (3).

– Haig envisage encore un plan ambitieux et irréaliste. Rawlinson attaquerait donc la ligne du Transloy avant d’avancer au nord-est, en direction de Beaumetz. Il devrait ensuite obliquer vers l’est, prendre Marcoing pour encercler ensuite Cambrai par le sud-est. Quant au mouvement que doit opérer Gough, il n’est pas précisément établi. Gough sait néanmoins qu’il devrai s’emparer d’Achiet-le-Grand et probablement opérer sur le flanc gauche de Rawlinson, lorsque la IVth Army s’approchera de Cambrai (4).
Edmund Allenby (qui se rend également au QG de Haig le 30 septembre) se voit confier la mission d’effectuer une attaque en pince à la gauche (nord) de l’ensemble du mouvement britannique. Sa IIIrd Army aurait pour objectifs le plateau de Beaurains-Monchy, isoler l’ennemi par le nord et bombarder le Canal du Nord pour empêcher les Allemands de s’y reformer. Ensuite, il devra reprendre son avance pour piéger l’ennemi dans une poche formée entre le Canal du Nord et les marais de Scheldt, autour de Hamel-Balencourt. On constate une fois de plus que Haig ne pense pas en termes d’attrition des forces ennemies mais en termes de mouvement.

– Regardons les difficultés que représente ce projet offensif. Premièrement, dans le cas de la IVth Army, Rawlinson devra faire abattre environ 9 km à ses troupes entre Flers et Marcoing, puis 9 km de plus jusqu’à Beaumetz et enfin, 9 km de plus avant de s’approcher de Cambrai. En résumé, Rawlinson devra planifier une série d’attaque pour un bond de moins de 30 km, alors que son armée n’a mordu qu’un peu plus de 10 km en cinq mois ! Pour Gough, les distances à couvrir sont approximativement les mêmes. Et pour Allenby, c’est 18 km. Mais il a aussi la tâche de déplacer rapidement son artillerie lourde pour interdire aux Allemands de se replier sur le Canal du Nord.

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Edmund Allenby, commandant de la IIIrd Army

– Pour Prior et Wilson, ce plan ne pouvait fonctionner. D’une part, pour que Haig puisse engager sa cavalerie, il aurait fallu compter sur un écroulement du dispositif allemand, jusqu’à la dernière équipe de mitrailleuse et à la dernière batterie. D’autre part, la IIIrd Army d’Allenby ne disposait pas des moyens adéquats pour déplacer rapidement son artillerie lourde et les munitions allouées, que ça soit sur rail ou par route. Tout ce plan n’est que le résultat de l’imagination de Haig. Plan qu’il couche encore, au gré de ses inspirations lorsqu’il rédige son journal. Mais Haig conçoit aussi ses plans de bataille en termes de batailles décisives de type napoléonien. Sauf qu’en 1916, les grandes charges de cavalerie n’ont plus leur place (5).

– Revenons-en au front. Rawlinson et Gough s’emploient à appliquer les ordres de leur supérieur à mesure du possible. S’il est resté imprécis sur les objectifs à atteindre, Haig a enjoint à ses deux commandants d’armée de n’effectuer aucune pause dans les offensives. Mais les Britanniques doivent faire face à une artillerie allemande de plus en plus agressive, tandis que l’infanterie s’était montrée particulièrement tenace en septembre. Du coup, rien n’indique que les Allemands sont au bord de l’effondrement. Côté britannique, entre la fin de septembre et le 13 octobre, les 6 divisions qui tiennent le front de la Somme entre Le Transloy et l’Ancre sont remplacées par 7 nouvelles ponctionnées dans d’autres Corps du BEF. Mais le 2 octobre, une forte pluie arrose le champ de bataille et cloue les pilotes du RFC au sol. Le 3, c’est au brouillard de faire son apparition. Et la pluie se remet à tomber du 4 au 6. Par conséquent, cela met à mal le plan de Rawlinson et de Gough pour s’emparer rapidement des objectifs qui leur sont assignés.

– Pour l’attaque, Rawlinson met en lice ses trois corps d’armée, alignant 6 divisions en tout. Tout à droite, en liaison avec les Français, le XIVth Corps de Rudolph Lambart Earl of Cavan (56th et 20th Divisions), doit attaquer en direction du nord-est, sur Beaulencourt et Le Transloy depuis l’arc Guedeucourt – Lesboeufs. Au centre, le XVth Corps de John Du Cane – qui a remplacé Henry Horne – (12th et 41st Divisions) doit attaquer vers le nord, en direction de Thilloy, des deux côtés de la route Flers-Thilloy. Enfin, tout à gauche – à l’est de la route Albert-Bapaume –, le IIIrd Corps de William Pulteney (47th et 23rd Divisions) doit marcher en direction de l’Abbaye d’Eaucourt et de Thilloy, en s’emparant du village-rue de Le Sars qui verrouille l’accès à la Butte de Warlencourt.

– En face, les forces allemandes se répartissent comme suit (voir carte ci-dessous) :  le IX. Reserve-Korps de Max von Böhn (1. Armee) tient  la gauche (est), avec les 18.17. et 7. Reserve-Divisionen. La 17. Reserve-Division (Hugo Freytag von Loringhoven) tient l’extrémité gauche du front allemand au sud du Transloy. Mais elle ne jouera qu’un rôle mineur dans la défense. La 18. Reserve-Division de Theodor von Wundt (RIR Nr. 31, 84 et 86) protège l’accès au Transloy. Sur sa droite, la 7. Reserve Division de Bogislav von Schwerin (RIR Nr. 36, 66 et 72).
Ensuite, le IV. Korps de Bernhard Sixt von Arnim (2. Armee) tient le flanc droit (ouest) soit Le Sars, Warlencourt-Eaucourt et Ligny-Thilloy, avec la 6. Königlich-Bayerisches-Reserve-Division de Gustav Scanzoni von Lichterfels et 4. Ersatz-Division d‘Albert von Werder. Les Bavarois (KBRIR Nr. 16, 20 et 21) tiennent les lignes qui protège le Barque et donc Ligny et Thilloy, tandis que les territoriaux de la 4. Ersatz-Division (Ers.Regt. Nr. 360, 361 et 362) tiennent Le Sars et la Butte de Warlencourt.

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2 – L’ATTAQUE PREPARATOIRE (1er OCTOBRE)

– Le 1er octobre à 07h00, la IVth Army démarre son tir de préparation d’artillerie sur l’ensemble de son front. Devant la Tranchée « Gird », sur le flanc droit, la Special Brigade Royal Engineers tire des cylindres inflammables à l’aide de 36 Livens Projectors, une minute avant l’attaque de la New Zealand Division (Andrew Russell) du XVth Corps de J. du Cane (flanc droit). Le spectacle est impressionnant, donnant l’image des positions allemandes noyées dans le feu. Sauf que lorsque la 2nd NZ Brigade sort de sa tranchée, les mitrailleurs allemands répliquent immédiatement, infligeant de lourdes pertes (850 hommes) aux 2nd Canterbury et 2nd Otago Battalions. Néanmoins, les Néo-Zélandais parviennent à s’emparer des tranchées « Circus » et « Gird », avant de se réorganiser sur la route de Le Barque et de consolider leur ligne avec la 47th Division sur « Abbey Road ».

Sur le flanc droit du IIIrd Corps de William Pulteney, la 47th (1/2nd London) Division attaque avec sa 141st Brigade avec l’abbaye d’Eaucourt pour objectif, avec l’appui d’un char. Néanmoins, le secteur est bien défendu par le II/Bayerisches-Reserve-Regiment Nr. 17 et le 1/20th London est forcé de se replier en abandonnant ses chars.

La 50th (Northumbrian) Division de Wilkinson attaque avec la 151st Brigade. Malgé les pertes dues aux mitrailleurs allemands, le 1/9th Durham Light Infantry (Lt.Col. Bradford) réussit à prendre le reste de la tranchée de Flers et à se renforcer pour organiser une nouvelle attaque. Au centre, les 1/5th Border, 1/8th Durham Light Infantry et 1/5th Northumberland (149th Brigade) bénéficient d’un très bon barrage d’artillerie et permettent de contrôler définitivement la tranchée.

– Sur la gauche du IIIrd Corps, la 23rd (Northumbrian) Division du Major-General Babington, attaque avec sa 70th Brigade contre l’aile gauche de la 6. Königlich-Bayerisches-Reserve-Division. Sur la droite, le 11th Forresters s’empare d’une portion de la Tranchée de Flers, pendant que le 8th King’s Own Yorkshire Light Infantry s’empare d’une autre portion en établissant le contact avec l’aile droite de la 2nd Canadian Division (droite de la Reserve Army). Malheureusement, l’avance des divisions des XVth et IIIrd Corps se fait au détriment des communications avec les QG qui ne sont pas informés de la progression. Cependant, les divisions d’attaque n’en continuent pas moins leur avance. Ainsi, la 50th Division dégage définitivement le « soutien de Flers » (« Flers Support »), tandis que la 47th Division de George Gorringe repousse avec succès plusieurs contre-attaque du ReserveKöniglich-Bayerisches-Regiment Nr. 21, à la grenade et au mortier Stokes. Les Britanniques réussissent à s’approcher de l’Abbaye d’Eaucourt mais la 69th Brigade de la 23rd Division est repoussée devant la route Albert-Bapaume. Le commandant de la 6. Königlich-Bayerisches-Reserve Division, Gustav Scanzoni von Lichterfels, en profite pour remplacer le KBRR Nr. 21 par le Nr. 16 qui va se montrer beaucoup plus mordant malgré les conditions météorologiques. En outre, la pluie se même de la partie, contraignant Rawlinson à reporter son attaque au 7. Néanmoins, le 5, les 47th et 23rd Division tentent toujours de dégager Eaucourt et atteindre Le Sars mais la résistance allemande s’est durcie. Le 11th Northumberland Fusiliers réussit à prendre le Tangle, à l’est de Le Sars mais sa position devient vite intenable par manque de soutien et il doit se replier. Mais il finit par s’en emparer le 7. Néanmoins, l’artillerie allemande commence à réagir et cause des pertes aux Britanniques. En outre, les observateurs britanniques sont dans l’incapacité de repérer précisément les batteries et les positions allemandes, l’attaque britannique est un sanglant échec. D’autant, les Allemands ont aménagé de nouvelles tranchées qui n’ont pas été repérées par les observations.

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Frederick Rudolph Lambart, commandant du XIVth Corps

2 – L’ATTAQUE DU 7 OCTOBRE

– L’assaut britannique reprend le 7 octobre. Le XIVth Corps de Frederick Rudolph Lambart Earl of Cavan doit s’emparer de la moitié est d’un ensemble de tranchées au nord-est de la ligne Gueudecourt –  Lesboeufs (« Hazy Trench », « Dewdrop Trench », « Misty Trench », « Spectrum Trench », et « Rainbow Trench »), avant de marcher sur Beaulencourt et Le Transloy. Les 56th et 20th Division sont chargées de cette mission face à la 7. Reserve-Division allemande. La première doit s’emparer d’une portion de « Rainbow Trench » mais ne peut prendre « Spectrum Trench » en raison d’une forte résistance. De son côté, la 20th (Light) Division de Richard Davies réussit à s’emparer de « Rainbow Trench ».

– A la gauche du XIVth Corps, le  XVth Corps de John Du Cane doit attaquer sur  l’aile droite de la 7. Reserve-Division et de s’emparer de la moitié ouest du réseau de tranchées qui protège Beaulencourt. Sur la droite, la 12th (Eastern) Division du Major-General Arthur Scott part à l’assaut, avec pour objectifs une portion de la tranchée « Rainbow » et la « Bayonet Trench », toutes deux barrant l’accès à la route Flers-Thilloy. Mais l’assaut de la division est anticipé par les Allemands qui ouvrent un violent tir de mitrailleuses. A la gauche, la 41st Division de Sydney Lawford attaque contre l’aile ouest de la « Bayonet » Trench mais se fait violemment repousser par les mitrailleuses allemandes. Sa 122nd Brigade qui attaque avec ses quatre Battalions ne fait que gaspiller ses hommes.

– Dans le secteur du IIIrd Corps, les 23rd et 47th Divisions poursuivent leur avance sur Le Sars, la Butte de Warlencourt et Le Barque. Là encore, la résistance allemande est forte. Néanmoins, le 9th Green Howards parvient à dégager le Tangle mais les autres Battalions de la 23rd Division ne peuvent approcher de Le Sars, faute de renforts. La Butte de Warlencourt est elle aussi inatteignable. Le 8, les Britanniques se reposent. Néanmoins, pendant la nuit, les 1/22nd et 1/21st London réussissent à s’emparer de la Tranchée « Snag » après avoir rampé dans le no man’s land. Du coup, la 23rd Division peut accrocher la route Eaucourt – Warlencourt. Au prix de durs combat, elle parvient à dégager les reste de Le Sars. Sur le flanc droit britannique, la 56th (London) Division – en liaison avec la VIe Armée française –  parvient à prendre la tranchée « Hazy » mais sa 167th Brigade échoue devant les tranchées « Dewdrop » et « Spectrum ».

– Devant cette situation, Rawlinson espère que Fayolle réussira à prendre Sailly-Saillissel pour relancer le XVth Corps à l’attaque le 12 octobre. Du 9 au 12 octobre, Rawlinson fait relever plusieurs divisions épuisées, qui combattent depuis plus d’une semaine. Ainsi, le 11 octobre, au sein du XIVth Corps, les 56th et 20th Divisions sont remplacées par les 4th (William Lambton) et 6th (Charles Ross). Au sein du XVth Corps, la 41st Division laisse la place à la 30th (John Shea). Enfin, chez William Pulteney, les Ecossais des 9th (William Furse) et 15th (Frederick MacCracken) montent en ligne en remplacement des 23rd et 47th Divisions. Cette pause est aussi mise à contribution par le Royal Flying Corps pour effectuer des relevés photographiques des positions allemandes. Mais le mauvais temps empêche tout relevé adéquat. Et il faut aussi tenir compte des pilotes de la Jasta 2, beaucoup plus accrocheurs, malgré la perte de leur chef Oswald Boelcke le 28 septembre. Cet épisode démontre tout de même l’efficacité du tir du barrage quand il est bien employé contre une défense « conventionnelle ». A la fin  de la journée, John Du Cane émet ce constat : « nous avons tous été trop optimistes quant à nos chances de succès »

 

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John Philip Du Cane, commandant du XVth Corps

4 – L’ENLISEMENT (8-20 OCTOBRE)

– Le 8 octobre, la Reserve Army passe à l’attaque au nord-ouest de Le Sars. Il envoie deux divisions canadiennes fatiguées du Canadian Corps de Byng – la 1st de Currie et la 3rd de Lipsett – contre la Tranchée « Regina ». Mais les Canadiens n’ont pas plus de succès que les Britanniques et se font décimer par les mitrailleurs allemands. Des petits groupes réussissent quand même à atteindre la tranchée mais sans soutien, ils sont anéantis ou forcés de se replier. Mais pour Byng et ses hommes, les malheurs ne s’arrêtent pas là. Haig rend visite à son protégé à Toutencourt pour l’entendre se défausser sur le Canadian Corps. Haig note que selon Gough « les Canadiens n’ont pas fait ce qu’il fallait. Certains soldats n’étant même pas sortis de leurs tranchées ». Cette assertion ne fait qu’envenimer les relations entre Gough et les officiers canadiens qui ne sont déjà pas au beau fixe.

– Le 12 octobre, l’attaque britannique reprend sur l’ensemble du front de la IVth Army. En liaison avec la 18e Division du Général Lefèvre, la 4th Division de William Lambton (unité régulière) réussit à s’emparer de « Rainy Trench » (1st Royal Warwick). En revanche, la 10th Brigade ne peut s’emparer de la tranchée « Spectrum ».  De son côté, la 6th Division n’a pas plus de chance en échouant devant les tranchées « Zenit », « Cloudy » et « Mild ». Néanmoins, sur le flanc droit du XVth Corps, la 88th Brigade, détachée de la 29th Division au sein de la 12th fait quelques progrès. En effet, les Terre-Neuviens du Newfoundland Regiment (celui-là qui a failli disparaître le 1er juillet) s’emparent de la Tranchée « Hilt » qui forme l’extension de la tranchée « Rainbow ». En revanche, la 35th Brigade ne peut s’emparer la tranchée « Bayonet » très bien défendus. Et les pertes montent très vite au sein des Battalions. Ainsi, la 4th Division perd 1 446 hommes, soit 360 dans chacun de ses 4 Battalions d’attaque. Le 7th Seaforth de la 9th (Scottish) Division perd 467 hommes (sur 850 environ) ; le 2nd York and Lancaster de la 6th Division 200, et le 7th Norfolk de la 12th Division, 222.

– Du côté du XVth Corps, la 30th Division attaque avec 2 Battalions de la 90th Brigade (17th Manchester et 2nd Royal Scots Fusiliers) la tranchée « Bayonet » mais se fait repousser. Et la 89th Brigade (7th Norfolk, 7th King’s Liverpool et 2nd Bedfordshire) n’a pas plus de chance devant « Bite Trench ». Enfin, le IIIrd Corps a pour mission de prendre la butte de Warlencourt et la tranchée « Snag ». Les Écossais partent à l’assaut derrière un bombardement fumigène effectué par le 4th Special Company Royal Engineer contre le Petit Bois et la Butte de Warlencourt. Mais lors de l’assaut, le 7th Seaforth Highlander (26th Brigade) se fait cueillir par un violent feu de mitrailleuses. Seul le 10th Argyll and Sutherland Highlanders réussit à grignoter 180 m. Enfin, la South-African Brigade est elle aussi bloquée devant la Butte de Warlencourt par un violent feu de mitrailleuses. L’attaque du 12 octobre n’a donc enregistré aucun gain supplémentaire. Pour Rawlinson, c’est le mauvais temps qui a permis aux Allemands de se réorganiser. Pour le commandant de la IVth Army, il faut recourir à un bombardement plus méthodique avant de lancer une nouvelle attaque le 18 octobre. Rawlinson assigne à ses commandants de corps de faire sauter les verrous que sont les tranchées « Zenith », « Mild », le reste de la tranchée « Cloudy » (XIVth Corps), le sud-est de la route Eaucourt-Le Barque (XVth Corps), ainsi que la tranchée « Snag ».

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– Le 14 octobre, Rudolph Lambart ordonne à la 4th Division de lancer une attaque surprise contre les tranchées « Rainy », « Dewdrop », « Spectrum » et « Hazy ».  Mais chaque asaut est repoussé par la défense allemande. Le 15 octobre, la 6th Division tente une attaque contre les tranchées « Spectrum », « Dewdrop » et « Mild » mais sans plus de succès. Sur le flanc droit (IIIrd Corps), les Sud-Africains ont plus de chance quand le 3rd South African Regiment prenant de nuit le « Pimple » et la Tranchée « Snag ». Mais la pluie vient arrêter les initiatives britanniques pour le 15 octobre. Mais le 17, le bombardement d’artillerie démarre.Dans la nuit du 17-18 octobre, plusieurs Battalions d’attaque profitent que la lune soit masquée par des nuages bas pour s’approcher au plus près des lignes allemandes, avec des grenades. Les Tommys doivent ramper dans la boue, avec seulement des grenades et quelques munitions pour ne pas être alourdis. Malheureusement, du côté de la 4th Division, la 11th Brigade ne peut s’emparer des tranchées « Frosty », « Hazy », « Rainy » et « Dewdrop », toujours bien défendues par des mitrailleuses.

– Au XVth Corps, John Philip Du Cane décide d’attaquer sur ses flancs car son centre est pratiqueent à cheval sur la route Flers-Thilloy, bien mieux défendu. Sur la droite, la 12th Division réussit à s’emparer de la tranchée « Grease » avec des pertes mineures. En revanche les tranchées « Hilt » et « Bayonet » ne peuvent être enlevées en raison d’une forte résistance. Même quand la 30th Division envoie plusieurs Battalions contre les tranchées « Bayonet » et « Bite », c’est un échec. Dans l’assaut, le 2nd Wiltshire manque d’être complètement anéanti. Enfin, du côté du IIIrd Corps, la 9th (Scottish) Division combat durement pour prendre la tranchée « Snag » et s’approcher de la Butte de Warlencourt. Plusieurs tranchées sont prises par le 5th Cameron Highlanders et le 1st South African Regiment mais les contre-attaques allemandes ruinent tous les efforts. Et la tranchée « Snag » est toujours inaccessible.

– Plusieurs combats sporadiques ont encore lieu jusqu’au 20 octobre. Mais à cette date, Henry Rawlinson doit encore constater que son armée est trop épuisée pour s’approcher du Transloy et de le Sars.

Deutsche Luftstreitkräfte im Ersten Weltkrieg

– BILAN

– L’échec de l’offensive tient en plusieurs raisons : l’absence d’effet de surprise, le renforcement des positions allemandes, le manque d’observation et l’efficacité des tirs de mitrailleuses allemandes. Mais cela ne peut exonérer la mauvaise préparation des britanniques. Ainsi, Haig n’a pas laissé le temps à Rawlinson de faire réaménager les positions de sa IVth Army, positions qui n’étaient pas définies avant l’attaque. D’autre part, la boue a empêché le génie britannique d’installer des rails pour remplir les stocks d’artillerie. Du coup, la seule voie praticable reste la route Longueval-Flers, que les Allemands n’ont pas tardé à bombarder à l’aide obusiers. Enfin, au sein des batteries même, les officiers ne disposaient pas de cartes récentes des secteurs à bombarder (6).

En outre, chez les Tommys, le moral a sensiblement baissé, notamment en raison du mauvais temps. Ainsi, John Vereker Gort (ou Lord Gort, qui commandera le BEF en 1940), alors membre de l’état-major du BEF, fit le constat alarmant de la situation en première ligne après une visite : tranchées inondées et des soldats épuisés qui sont contraints de manger leur repas froid avec de l’eau jusqu’aux genoux (7).

– Mais cela ne dissuade pas Haig de lancer une septième attaque afin de pressurer les lignes allemandes, là encore dans l’espoir de les rompre. Ainsi, il ordonne à Rawlinson d’attaquer une fois de plus sur Le Transloy pour le 5 novembre, avant de pousser sur Beaulencourt avec les Français. Mais un mécontentement frémit au sein des officiers du XIVth Corps qui doit se charger de la besogne. Rudolph Lambart Earl of Cavan, commandant du Corps, écrit alors à Rawlinson pour lui signifier qu’une telle attaque « n’a pas une seule chance de succès » et que « ça ne serait pas une défaite que de ne pas soutenir l’attaque des Français ». Enfin, Lambart appuie son propos par ses derniers mots : « personne qui a visité les tranchées du front ne peut nier l’état d’épuisement auquel les soldats sont réduits » (8). Mais Rawlinson réplique que l’attaque se fera en raison des obligations envers les Français. Et il insiste pour qu’une attaque « test » ait lieu le 3 novembre pour conduire au mieux celle du 5. Mais l’attaque du 3 échoue, Rawlinson y voyant le résultat d’un manque de vigueur. Finalement, après un entretien avec Foch, Haig lui soutient que l’attaque aura bien lieu. Le XIVth Corps (17th, 33rd et 50th Divisions) devra opérer une attaque en deux formations séparées, ce qui n’a aucune cohérence. Là encore, la défense allemande se montre accrocheuse et efficace et 2 000 hommes sont gaspillés en pure perte. Mais les combats ne s’arrêtent pas là, les Britanniques et les Allemands tentant de conquérir ou reconquérir des tranchées pendant la première moitié du mois de novembre. Ainsi, les 50th et 33rd Divisions perdent chacune 2 200 hommes et la 17th 1 300. Rawlinson fait entrer l’Australian Corps dans la bataille mais celui-ci patauge tout autant que les Britanniques, perdant plusieurs milliers d’hommes.

– A la mi-novembre, la IVth Army est à bout et Haig autorise Rawlinson à cesser toute attaque. En revanche, il décide de faire porter son effort sur les épaules de la Reserve Army.

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(1) PRIOR R. & WILSON Tr. : « The Somme », Yale University Press, Londres, 2006
(2) PRIOR R. & WILSON Tr., Op.Cit.
(3) Ibid.
(4) Ibid.
(5) Ibid.
(6) Ibid.
(7) Ibid.
(8) Ibid.

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